Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 4.djvu/154

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BER seul et même homme. Le danger ne s’opposait point à ses recherches scientifiques : un jour qu’il remontait le Nil sur une barque où les Mameluks lui envoyaient force balles, on le vit remplir ses poches de pierres. « Que prétendez-vous faire ? lui demanda-t-on. — Couler à fond plus vite, répondit-il, et n’éu-e pas mutilé par ces barbares. » Pendant le siège de St-Jean-d’Acre, Berthollet, voyant la peste mminente, n’hésita point à se joindre au baron Larrey pour annoncer ce fléau terrible. On le blâme, on l’accuse d’imprudence et de témérité : à Dans, huit jours, s’écrie Berthollet avec douleur, je serai trop vengé. » Sinistre prédiction, et qui bientôt s’accomplit en dépit du chef qui voulait se dissimuler à lui-même cet horrible fléau. La retraite commença. Berthollet, forcé de céder son carrosse à des généraux blessés, parcourt à pied vingt lieues de désert comme il eût fait une promenade. — Peu de temps avant le 9 thermidor, un dépôt graveleux, trouvé au fond de quelques barriques d’eau-de-vie, donne lieu à une grave accusation contre un fourmsseur qui voulait, disait-on, empoisonner l’armée. On conüe à Berthollet l’analyse du liquide. Tout annonçait qu’on cherchait un coupable et que l’on convoitait les richesses du fournisseur. Berthollet, toujours inflexible quand il s’agissait de probité et de justice, n’hésite pas a faire un rapport favorable. Appelé devant cet indigne tribunal qui portait le nom de comité de salut public, il est interrogé d’un ton menaçant za Es-tu sur de ce que tu dis ?a Très-sûr, répond avec calme le savant. — Feraistu sur toi l’épreuve de cette eau-de-vie T » Berthollet, sans dire un mot, en avale un grand verre. Tu es bien hardil — Moins que je ne l’étais en écrivant mon rapport. » Son désintéressement, sa générosité ne méritent pas moins d’admiration que’ son héroïsme. Quoique continuellement géné, soit par ses dispendieuses expériences, soit parce que, comme beaucoup de génies élevés, il avait toujours l’art de partir d’un arriéré, il ne chercha jamais à tirer parti pour lui de ses recherches, qu’il eûtpu tenir secrètes sans que qui que ce f1ltl’en eût blàmé. Une découverte n’était pour lui qu’un théorème de plus, et ce théorème un degré plus haut pour monter à la vérité. Sous le point de vue militaire, sa patrie, ou plutôt le monde, et non lui, devait récolter la moisson semée par lui. Le chlore ne lui valut qu’un ballot de toiles blanchies par son procédé : encore sa délicatesse hésita-t-elle à l’accepter, quoique les Anglais qui le lui envoyaient lui eussent offert de le prendre pour associé. Son fils éleva une manufacture de soude ; mais déjà Berthollet avait appris à l’Europe le moyen d’obtenir de la soude, et plus d’une opulente fabrique s’était élevée à sa voix. Sa modestie égalait son mérite ; et souvent Napoléon, qui rassemblait sur la tète de son chimiste toutes les découvertes chimiques du siècle, l’entendait faire la répartition des gloires entre lui et ses confrères, entre les Français et l’étranger. Les gens de lettres ont remarqué que, quoique peu habile dans l’art d’exposer ses idées, il n’était pas ennemi de la littérature, et que dans l’âge mûr et dans la vieillesse il

BER ·· ···· — 149 était resté fidèle au goût que jeune il avait pour les représentations de la scène. Sa mort, trop annoncée par les douleurs qu’il ressentait, arriva le 6 novembre 1822, dans sa maison d’Arcueil. Ses obsèques se firent dans la commune même, avec toute la solennité que commandaient son rang et sa célébrité. Son buste, magnifiquement exécuté par M. Gayrard, est un des plus beaux ornements de la bibliothèque de l’Institut. Au nom de l’Institut de France et de l’institut d’Égypte, MM. Chaptal, Thénard, Gay-Lussac, furent les premiers organes de la douleur pu- ’ blique. Chaptal renouvela cet hommage à sa mémoire dans la chambre des pairs, le 19 février 1825. Cuvier a prononcé son éloge le 7 juin 1824, dans le sein de l’académie des sciences. Un autre éloge, par ’ le docteur Pariset, a retenti au milieu de l’académie royale de médecine. Enfin, la Revue encyclopédique (t. 16, p. 454, t. 50, p. 25), le Journal des Débats (25 novembre 1822, article d’Auger et de Chevreul), le ·’ Journal philosophique d’Édimbourg (t. 9, p. 1, 1825) et la Biographie piémontaise (t. 5, p. 252) lui ont consacré des notices intéressantes. Les ouvrages de Berthollet n’ayant jamais été réunis, nous en avons donné la bibliographie avec le plus grand soin. On remarque que presque tous sont épars dans les Mémoires de l’académie des sciences et les Mémoires del’Institut, dans le Journal de physique, dans les Annales de chimie, le Bulletin de la société phil., le Magasin encycl., les Mémoires sur l’Égypte, les Mémoires de la soc. d’Arcueil. Pour compléter la bibliographie de Berthollet, il faudrait joindre la liste de quelques ouvrages auxquels il a coopéré, et de quelques autres dom. il n’a été que traducteur ou éditeur. Tels sont notamment le Mémoire de Wollaston sur le palladium (Annales de chimie, 1809) et celui de Davy, sur quelques affinités secrètes de l’électricité (ibid., 1807). M-z et Vu. P. ·

BEBTHOLON (Nxeonas), que l’on désigne quelfois sous le nom de Bnuruonozv on S·r-Lazans, parce qu’il appartenait à la communauté des lazaristes, dans laquelle il entra fort jeune, naquit à · Lyon et y mourut en 1799, après avoir été successivement professeur de physique à Montpellier, et professeur d’histoire à Lyon. Ami de Franklin, Bertholon s’occupa beaucoup des phénomènes de l’électricité, à laquelle il attribuait presque tous les accidents de Patmosphène, et il fit élever dans les villes où il demeura un grand nombre de paraton-· nerres. Les opinions qu’il émit relativement aux effets médicinaux du fluide électrique ont eu beaucoup · de partisans, bien qu’elles ne reposent que sur des hypothèses, et qu’elles aient été réfutées victorieusement par van Broostwyck : aujourd’hui elles sont complètement oubliées. Il croyait aussi que les tremblements de terre étaient dus à un défaut d’équilibre entre l’électricité terrestre et l’électricité atmosphérique, et pour prévenir ces secousses désastreuses, il imagina dif’f’érents moyens aussi bizarres qu’inutiles. Presque tous les ans, Bertholon remportait deux ou trois prix aux concours académiques Cependant il n’a rien laissé de bien remarquable. Ses ouvrages sont :1° Mémoire sur un nouveau moyen de sepré