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Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 43.djvu/21

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blanc publia des Mémoires ur la révolution de France (Paris, 4 vol. in-8°), et en 1838, deux volumes de Souvenirs, dans lesquels il reproduisit un grand nombre de faits et d’aperçus empruntés à la première de ces publications. Le comte de Vaublanc est tout entier dans ces deux ouvrages, où, à travers un sentiment exagéré de personnalité, on distingue des vues hautes et utiles, des particularités intéressantes et bien observées, et quelques vérités politiques fortement exprimées. Vaublanc se montre favorable en toute circonstance à la liberté de la presse, qu’il regarde comme entrée dans nos habitudes et dans nos mœurs, et ne cesse de recommander la modération et la tolérance envers les partis même dont il veut qu’on réprime avec vigueur les entreprises ou les écarts : dispositions qu’on ne saurait trop honorer chez un homme que l’animosité contemporaine s’est plu à signaler comme un partisan outré du pouvoir absolu, et dont la qualité la plus incontestable fut un grand courage personnel, accompagné d’une foi opiniâtre et souvent excessive dans les idées et les impressions qui lui étaient propres[1]. Le comte de Vaublanc mourut à Paris, presque entièrement aveugle, le 21 août 1845, dans sa 90e année, sans laisser aucune fortune.

De son mariage avec mademoiselle de Fontenelle, il n’avait eu qu’une fille, mariée en premières noces à M. Segond, officier du génie distingué, qui périt au siège de Saragosse. Un fils unique, qu’il avait laissé, succéda plus tard au nom et aux titres de son grand-père ; mais il ne lui survécut que quelques mois. La veuve de ce militaire a épousé en secondes noces M. Potter, gentilhomme anglais, dont la famille s’est fait honorablement remarquer dans l’Église et dans les lettres.


VAUBLANC (Jean-Baptiste-Bernard Viénot, chevalier de), frère du précédent, naquit à St-Domingue le 17 septembre 1761. Il fut élevé à l’Ecole militaire de Paris et retourna sous les tropiques, où il fit, à seize ans, sa première campagne. Il prit part à la guerre de l’indépendance, et reçut du gouvernement américain des concessions territoriales en reconnaissance de son concours. Il revint en France en 1793, fut nommé adjudant général par Pichegru, et fit partie en cette qualité de l’armée du Rhin. Napoléon lui conféra le grade de général de brigade. Lors de la création des inspecteurs en chef aux revues, le duc de Feltre le proposa au gouvernement pour remplir ces fonctions, et ce choix fut justifié par l’intégrité sévère et la remarquable activité que Vaublanc déploya dans leur exercice. Il fut employé, en 1808, dans la guerre d’Espagne et de Portugal, et rendit, à l’aide de ces qualités précieuses, de grands services à l’armée française et aux populations. En 1812, Vaublanc fut appelé à faire partie de l’expédition de Russie, et se mit en route sans tenir compte des instances de sa famille et des exhortations du maréchal Berthier, qui le pressaient vivement de prendre quelques semaines de repos. Il organise avec zèle la vaste administration qu’il était appelé à diriger. Vaublanc pénétra dans Moscou à la suite des victoires de la grande armée ; mais le succès de nos armes ne lui faisait pas illusion sur le caractère aventureux de cette gigantesque expédition : « Quelle serait ma folie d’être venu jusqu’ici, écrivait-il en France, si les motifs les plus légitimes ne m’y avaient conduit ! » Quelques tableaux précieux qui ornaient son salon, sauvés de l’incendie de cette capitale, restèrent quelques jours après ensevelis sous les neiges, et cette désastreuse retraite anéantit aussi les matériaux d’un grand ouvrage où Vaublanc avait déposé les fruits de sa longue expérience dans l’administration militaire. Mais elle devait lui coûter plus encore. Parvenu aux portes de Wilna à travers mille périls et des souffrances infinies, Vaublanc succomba le 19 décembre 1812, ayant partagé, dit un biographe, les entreprises et les désastres de l’empire, mais jamais sa gloire ni son opulence. Il laissa plusieurs enfants ; l’un d’eux, écrivain distingué, auteur de la France au temps des Croisades (Paris, 1844, 1849, 4 vol. in-8°), après avoir été auditeur au conseil d’État pendant la restauration, a été appelé au poste de grand maître de la maison de S. M. la reine de Bavière.


VAUBOIS (N. comte), général et législateur français, naquit à Château-Vilain. Entré de bonne heure dans l’artillerie, il était capitaine au commencement de la révolution. Pendant que beaucoup d’officiers de noble extraction comme lui passaient à l’étranger, Vaubois resta en France et y sollicita de l’emploi dans l’armée qui allait être appelée à défendre le sol de la patrie. Il en fut récompensé par un rapide avancement. En 1793, il fit partie de l’armée des Alpes ; employé ensuite au siège de Lyon, il emporta les redoutes des Brotteaux. Revenu à l’armée des Alpes, il enleva vaillamment le 14 septembre 1794, et à la baïonnette, le poste des barricades que défendaient les Piémontais. Il commandait le centre de l’armée lorsque, le 21 octobre 1795, il chassa l’ennemi d’Argentara et le poursuivit à plusieurs lieues au-delà. Placé, l’année suivante, sous les ordres du général Bonaparte, il prit Livourne le 29 juin, et le 3 septembre il débusqua l’ennemi du pont de la Sarca ; le lendemain, il força les autrichiens dans le camp retranché de Mori. Le 5 il marcha sur Pavie dont le colonel Dessaux, commandant l’avant-garde, traversa le pont sous le feu de l’ennemi et délivra l’adjudant général

  1. On doit encore à Vaublanc divers ouvrages ou opuscules politiques ou économiques de moindre importance, dont on trouvera la liste dans la France littêraire de Quérard, et notamment : 1° Rivalité de la France et de l’Angleterre, dépuis la conquête de l’Angleterre par Guillaume, duc de Normandie, en 1066, jusqu’à la rupture du traité d’Amiens par l’Angleterre en 1803, 1808, in-8° ; 2° Sur le commerce de la France, 1822, 1824 et 1828 ; 8° Fastes mémorables de la France, 1838, in-8° ; 4° Contes et mélanges de littérature, 1840, in-8°, etc.