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des enchantements. Telles furent les attaques auxquelles, depuis l’âge de sept ans jusqu’à celui de quinze, il fut constamment en butte. Une piété et une sagesse surnaturelles purent seules empêcher de tomber dans les piéges qui lui étaient tendus. Sa générosité et sa bienfaisance n’étaient pas moins remarquables : il prodiguait les consolations et les secours, arrangeait les affaires de quiconque s’adressait à lui, distribuait ses habits et ses biens et acquérait ainsi une grande célébrité parmi les peuples de l’Aderbaïdjan. A l’âge de trente ans, il se sentit attiré vers l’Iran (Zerdust-Namah, chap. 16), mais il ne fit qu’y passer et ne chercha point à y répandre de doctrine nouvelle : il n’avait point eu alors de conférence avec Ormuzd. Dans la suite, il quitte son domicile habituel et sa patrie, accompagné de ses parents. Arrivé sur les bords d’un fleuve, il ne voit point de bateau et songe déjà à revenir sur ses pas, quand, obéissant à une inspiration soudaine, il invoque le Seigneur et pose le pied sur les eaux qui ne s’enfoncent point sous son poids. Tous ceux qui le suivent en font autant et traversent à pied sec la surface du liquide. C’était le 30 espendarmad, ou dernier jour de l’année, et l’on célébrait les Farcardians, c’est-à-dire la féte des âmes de la loi. Zoroastre y assista, et, quelques jours après, reprit sa route vers une autre contrée, les yeux baignés de lames en songeant aux contradictions qu’il allait éprouver. Un pays brillant, fertile, semblable au Paradis, le conduit à une mer, dans laquelle il s’engage avec autant de confiance que sur le fleuve qu’il a traversé avec ses parents, mais dans laquelle il a de l’eau d’abord jusqu’au talon, ensuite jusqu’au genou, puis jusqu’à la ceinture, et enfin jusqu’au cou, sans que du reste il coure le moindre danger. Selon les auteurs orientaux, qui racontent religieusement le commencement de ce fait comme un prodige, les quatre hauteurs de l’eau étaient symboliques et signifiaient que la loi d’ormuzd recevrait dans le monde quatre accroissements à quatre époques différentes : le premier sous Zoroastre, le deuxième et le troisième sous les prophètes Uchederbamí et Uchedermah, vers la fin des temps et le quatrième, lors de la résurrection, sous Sosioch, qui rendrait l’univers pur comme le Paradis. De là, Zoroastre se rendit dans les montagnes, d’où Bahman, la main couverte d’un voile, l’emmène à travers la foule des anges jusqu’au trône d’ormuzd. Nous épargnerons au lecteur le détail des conversations dans lesquelles le futur réformateur du culte entre avec le bon principe et les Amchapands. Qu’il suffise de savoir que Zoroastre interroge successivement Ormuzd sur la morale, la hiérarchie céleste, les cérémonies religieuses, la fin de l’homme, les révolutions et l’influence des astres. Il finit en lui demandant l’immortalité ; mais bientôt. voyant par une révision surnaturelle tous les événements qui doivent arriver


jusqu’à la résurrection, il renonce à son vœu. Enfin, il reçoit de la bouche d’Ormuzd le Zend-Avesta, avec l’ordre de le prononcer devant le roi Gustasp, qui doit protéger la loi nouvelle et donner l’exemple de la piété et de la foi, et il reparaît dans le monde, le Zend dans une main et le feu céleste dans l’autre. Les magiciens et les dèves (mauvais génies), instruits de son retour, se rassemblent et forment une armée nombreuse pour s’opposer à son passage. La lecture d’un seul chapitre du livre divin suffit pour dissoudre cette coalition. Les dèves rentrent sous terre saisis d’effroi ; les magiciens demandent grâce ou tombent morts à ses pieds. Zoroastre se dirige ensuite vers Balkh et marche au palais de Gustasp, auprès duquel il veut être introduit ; mais, comme les gardes le repoussent, il fend le plafond ou la voûte du divan, où ce roi tient sa cour, et descend par l’ouverture au milieu des grands de l’lran et des sages les plus célèbres, rangés silencieusement autour du trône sur lequel siégeait le monarque. On conçoit la surprise des assistants ; mais cette surprise fait bientôt place à un autre genre d’étonnement lorsque Zoroastre, interrogé successivement par les sages sur toutes les sciences, répond à toutes les questions avec la plus grande facilité et développe sur toute espèce de sujet une érudition dont aucun d’entre eux n’a d’idée. Le prince, charmé, lui donne un logement magnifique près de son palais, et pendant deux jours encore le nouveau venu dispute avec les sages qui vainement épuisent leur science pour l’embarrasser. Quelques jours après, il présente le Zend-Avesta au roi, lui annonce sa mission et lui ordonne d’embrasser la vraie loi de ce Dieu qui a fait les sept cieux, la terre et les astres, qui lui a donné la couronne et la vie, et qui offre aux hommes fidèles adorateurs de sa puissance une gloire immortelle après la mort. Ni le magnifique langage du prophète, ni même la lecture du Zend-Avesta ne persuadent le monarque, qui demande du temps et des miracles pour croire. Zoroastre se fait arroser d’airain fondu et porte des flammes à la main sans être brûlé ; il plante près du palais un cyprès qui en quelques jours devient si gros que dix longues cordes peuvent à peine l’entourer : il dresse ensuite une grande salle sur les branches les plus élevées. Gustasp, frappé de ces prodiges, embrasse sa loi et se fait expliquer tous les jours le Zend. Le triomphe de Zoroastre n’était pourtant pas encore assuré. Ses ennemis et ses envieux gagnent son serviteur et vont cacher dans son appartement du sang, des ongles, des os de cadavres et autres objets réputés impurs par l’ancienne comme par la nouvelle loi ; puis, ayant accusé de sortilèges auprès du roi, ils engagent ce dernier à aller visiter par ses yeux la demeure du prophète. À la vue des ongles, du sang et des immondices qui semblent préparés pour des enchantements, le nouveau con-