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Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 6.djvu/182

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alla vivre a sa maison de campagne de Wiesena près de Klagenfurth ; et c’est la qu’il mourut, le 25 novembre 1831. Il a laissé quelques manuscrits dont l’observatoire de Vienne a cherché a faire l’acquisition.

Val. P.

BURGENSIS. Voyez Bourges.


BURGER (Godefroi-Auguste), poete allemand, né le 1er janvier 1748, Wolmerswende, village de la principauté de Halberstadt, où son père était pasteur luthérien. Il montra dans son enfance peu de dispositions à l’étude des lettres : la Bible et les cantiques avaient seuls des attraits pour lui ; il les savait par cœur, et ses premiers essais de versification furent des imitations de Psaumes, qui, dans leur imperfection, annonçaient de la verve et une oreille juste. C’est à cette première nourriture de son esprit qu’il faut attribuer les locutions bibliques, les allusions au christianisme, et le style, pour ainsi dire, d’église qu’on retrouve jusque dans ses poésies érotiques. Il aimait la solitude, et s’abandonnait aux sentiments qu’inspirent les déserts et les sombres forêts. De l’école d’Aschersleben, où demeurait son grand-père maternel, et qu’il quitta à la suite d’un châtiment brutal qui lui avait été infligé pour une épigramme, il fut envoyé au Pédagogium de Halle ; mais, ni dans l’une ni dans l’autre de ces institutions, ses progrès ne furent sensibles. Il ne montra de goût que pour les leçons de prosodie et de versification qu’on donnait aux élèves du Pédagogium, et que partageait aussi son ami Gokingk, devenu célébre dans la suite par des épîtres et des chansons[1]. En 1764, Bürger, destiné à la carrière ecclésiastique, commença a suivre les cours des professeurs de l’université. Klotz, savant humaniste, l’admit au nombre des jeunes gens dont il se plaisait a cultiver les dispositions ; mais cette société ne paraît pas avoir eu sur le caractère moral de Burger une influence aussi heureuse que sur son talent. Sa conduite indisposa contre lui son grand-père Bauer, et ce fut avec peine qu’il obtint de lui de nouveaux secours, et, en 1768, la permission de se rendre à Goettingue, pour y faire des études de droit, au lieu de celles de théologie. Ce changement ne le rendit pas appliqué ; ses mœurs se corrompirent, et son grand-père l’abandonna. Bürger fit des dettes, et sa position serait devenue tout a fait désespérée, sans l’appui de quelques amis. Une réunion mémorable dans les annales de littérature allemande venait de se former à Goettingue ; elle comptait parmi ses membres, Boje, Biester, Sprengel, Holty, Miller, Voss, les deux comtes de Stolberg, Ch.-Pr. Cramer, Leisewitz, etc. Burger y fut admis. Tous étaient versés dans la littérature grecque et romaine, et cependant tous idolâtraient Shakespeare. Ce phénomène, qui ne peut s’expliquer ni par les préventions nationales, ni par l’ignorance des grands modèles, tient à l’ensemble du système et de l’organisation des peuples du Nord. Bürger partageait avec ses amis l’enthousiasme pour le tragique anglais. Le Recueil de vieilles Ballades, principalement écossaises, publié dans ce temps par le docteur Percy, ne lit qu’accélérer sa marche dans la direction qu’il avait prise, et lui inspira quelques-unes des productions que ses concitoyens admirent le plus. Boje fut celui de ses amis qui exerça l’influence la plus marquée sur le choix et l’ordonnance de ses compositions. Il lui apprit à faire difficilement des vers faciles, et c’est à ses conseils sévères que la période poétique de Bürger doit en grande partie cette correction, cette rondeur qui la caractérisent. Il lui dut aussi quelque adoucissement à sa position, qui fut très-pénible jusqu’à l’an 1772. À la recommandation de Boje, les barons d’Usslar lui confièrent la place de bailli à Alvengleichen, dans la principauté de Calenberg. L’hiver suivant, des fragments d’un conte de revenants, qu’il entendit, chanter à une paysanne au clair de la lune, enflammèrent son imagination, et sa Léonore parut, pour être incessamment répétée dans toutes les parties de l’Allemagne. Peu après l’impression de cette ballade, une circonstance vint lui inspirer plus de confiance encore dans son talent. Faisant un voyage dans son pays natal, il entendit un soir, dans la chambre à côté de celle où il couchait, le maître d’école lire à une assemblée de villageois réunis à l’auberge, la Léonore, qui venait de paraître, et cette lecture accueillie par les plus vifs applaudissements. Ce succès le flatta plus que les éloges de ses amis. Vers ce temps, il épousa la fille d’un baillif hanovrien, appelé Léonhart ; mais cette union ne fut pour lui qu’une source d’amertume, une malheureuse passion pour la sœur cadette de sa femme s’étant allumée dans son cœur. La perte d’une somme dont son grand-père lui avait fait don avait commencé ses embarras de fortune ; l’entreprise de l’exploitation d’une grosse ferme qu’il ne sut pas régir les accrut, et la démission de sa place, qu’il fut obligé de donner en 1786, à la suite de soupçons, probablement mal fondés, élevés contre la fidélité de sa gestion, mit le comble à son infortune. Il avait, peu auparavant, perdu son excellente femme ; et il n’est que trop constant que sa mort fut accélérée par le sentiment coupable que Bürger nourrissait dans son cœur. Chargé de deux enfants, et réunit aux modiques honoraires de l’Almanach des Muses de Goettingue, dont il était éditeur depuis 1779, il se rendit dans cette ville pour y donner des leçons particulières, et dans l’espoir d’obtenir du gouvernement de Hanovre une chaire de professeur de belles-lettres : cinq ans après, ce titre lui fut conféré, mais sans traitement ; et ce fut la toute la récompense publique qu’obtint, durant sa vie, un des auteurs favoris de sa nation, qui, très-jeune encore, avait joui d’une grande renommée. À peine les cendres de sa femme étaient-elles froides, qu’il épousa cette Molly, que ses poésies n’ont rendue que trop célèbre, et qui avait empoisonné l’existence de sa sœur ; mais il ne jouit pas longtemps du bonheur après lequel il avait tant soupiré : elle mourut en couches au commencement de 1786. Depuis ce moment, il ne fit que languir, et le feu de son génie parut s’éteindre avec celle

  1. M. Gokingk a pleuré la mort de son ami Bürger dans une élégie.