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par lequel on condamnait à mort par contumace quelques-uns des habitants des villages de Cabrières, de Mérindol et lieux circonvoisins, on bannissait les autres, et on ordonnait de ruiner leurs maisons, etc. C’était un reste des anciens Vaudois, ignorés jusqu’alors, mais que la fermentation causée par les nouvelles hérésies avait rendus suspects. Tant que Chasseneux vécut, l’arrét ne fut point mis à exécution. De Thon prétend qu’il l’empêcha, sur les remontrances que lui fit Renaud d’Alleins, gentilhomme d’Arles, que, pendant qu’il était avocat du roi à Autun. il avait été d’avis qu’on ne pouvait excommunier les rats, avant de les avoir cités en justice et les avoir entendus au moins par procureur ; que les habitants de Mérindol, bien d’hérétiques, ne devaient pas être traités plus rigoureusement que ces animaux. Niceron a voulu révoquer ce fait en doute, en prétendant qu’il était tiré du Martyrologe des protestants. On voit cependant que Chasseneux, dans le premier de ses Conseils, imprimés à Lyon en 1531, in-fol., rapporte que les habitants de Beaune, voyant leurs vignes dévastées par une espèce de hannetons, étaient venus à Autun présenter requête à l’official, pour qu’il leur ordonnât d’évacuer leur territoire, sous peine d’excommunication. Chasseneux, consulté dans cette affaire, examine d’abord si les habitants de Beaune ont ce droit, et ensuite comment il faut procéder. La première formalité qu’il exige, à peine de nullité, c’est qu’on fasse citer les hannetons, afin qu’ils puissent être entendus, au moins par procureur. l’embarras était de savoir comment ils feraient leur procuration ; mais l’auteur prouve, par un grand nombre d’autorités, que quand un procureur se présente pour défendre quelqu’un qui ne le désavoue pas, il est censé revêtu de pouvoirs légitimes. Il trace ensuite au long la forme de la requête, de la citation et de la sentence. Il rappelle à cette occasion plusieurs procédures de ce genre qu’il a vu faire à Autun, à Lyon, à Mâcon, contre des animaux nuisibles, tels que les rats et les limacons. Renaud d’Alleins tirait de ce conseil de Chasseneux, imprimé depuis dix ans, un argument en faveur des Vaudois, auquel il n’y avait rien à répliquer. Il n’est par conséquent point étonnant qu’il ait fait impression. Ce qui le prouve, c’est que Chasseneux demanda au roi que les habitants de Mérindol fussent entendus, et qu’il obtint un ordre du roi qui l’ordonnait ainsi. Il ne survécut qu’une année a l’arrét du parlement, étant mort le 15 avril 1541. De Thou dit qu’il mourut subitement ; d’autres ont prétendu qu’il fut empoisonné avec un bouquet de fleurs, et Niceron croit que ce fut l’effet de la haine de ceux qui avaient conjuré la perte des malheureux Vaudois. Ç'aurait été, en tout cas, un digne prélude des barbaries qui se commirent sous le président d’Oppède, successeur de Chasseneux, entraîné moins par l’intérêt d’une religion qui ne commande rien de semblable, que par la haine qu’il portait aux seigneurs de Cabrières et de Mérindol, voisins de sa terre d’Oppède. (Voy. Oppède.) Les Principaux ouvrages de Chasseneux sont : 1° Consilia, Lyon, 1531, in-fol. : ce sont des consultations sur différentes matières de droit. 2° Catologus gloriæ mundi, Lyon, 1829, in-fol. : c’est le protocole de la vanité humaine ; il règle les rangs, les préséances. On y trouve des recherches sur les offices, dignités et charges de la couronne ; mais il y a beaucoup de fatras : l’auteur y copie sans scrupule des pages entières du traité de Tiraqueau, de Legibus connubialibus. 5° Consuetudines ducatus Burgundiæ, ac fere totus Gallia. Le commentaire sur la coutume de Bourgogne, de Chasseneux, a été imprimé plusieurs fois ; c’est un des premiers ouvrages dans lesquels on ait essayé d’éclaircir le droit coutumier de France, en le conciliant avec le droit romain ; la dernière édition est de 1647, in-fol. Il faut y joindre des notes de Dumoulin, in-fol., qu’on découvrit vers la fin du 17e siècle, et auxquelles il n’avait pas mis la dernière main. Malgré cela, Dumoulin ne faisait pas grand cas de Chasseneux ; il l’appelait un auteur de peu de jugement. D’autres l’ont accusé d’avoir pris beaucoup de choses dans leurs ouvrages. On lui en a aussi attribué qui ne lui appartiennent pas : entre autres des Remarques sur les ordonnances ; un traité de Casulis ; un autre de Viris illustribus. Il est auteur des vers latins dans les Epitaphes des rois de France, depuis Pharamond jusqu’à Froncoù Ier, Bordeaux, sans date, in-8°. Les vers français sont de Jean Bouchet. Cet ouvrage est fort rare. On trouve un éloge de Chameneux en tête de la Costume générale du duché ds Bourgogne, par Bouhier. (Voy. le t. 5 des Mémoires du P. Niceron.) B-I.


CHASSIGNET (Jean-Baptiste), né vers 1518, a Besançon, lit ses études au collége de cette ville sous Antoine Huet, professeur habile, qui lui inspira le goût des belles-lettres. Sa fortune ne lui permettant pas de se livrer entièrement à son inclination, il se fit recevoir docteur en droit, et obtint la charge d’avocat fiscal au bailliage de Gray. Il ne renonça cependant point à la poésie, et ce fut même sa seule distraction dans les peines dont sa vie fut continuellement traversée. On a de lui : 1° le Mépris de la vie et Consolation contre la mort, Besançon, 1594, in-12 : c’est un recueil de sonnets et d’odes qu’il avait composés dans sa première jeunesse. La lecture en est fatigante, la même pensée y reparaissant trop souvent. 2° Paraphrases en vers françois sur les douze petits prophètes du vieil Testament, Besançon, 1601, in-12. 3° Paraphrases sur les Cent cinquante psaumes de David, Lyon, 1615, in-12 : ces deux ouvrages ont les mêmes beautés et les mêmes défauts. On ne peut refuser à l’auteur de la verve, de l’abondance, de l’harmonie et un certain art dans la disposition des mots et dans la coupe des périodes, dont les poésies de ses contemporains n’offrent que très-peu de modèles ; mais il manque de goût dans le choix des expressions, et trop souvent il rend d’une manière bizarre les images sublimes des livres saints. Les Paraphrases des psaumes de David ne lui avaient couté que cinq mois de travail, et il promettait celle des livres de Job, si sa santé défaillante lui permettait de s’en occuper. Comme elle n’a point paru,