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Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 9.djvu/7

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fille de Geoffroi, comte d'Anjou ; il en eut plusieurs enfants. Il fit bâtir à Nantes le château du Bouffai, prit le titre de roi, et l'inscrivit sur ses monnaies.


CONAN II, fils d'Alain, duc de Bretagne, n’était âgé que de trois mois, lorsqu’il perdit son père. Eudon, son oncle et son tuteur, le tint renfermé pendant plusieurs années, et se saisit du duché ; mais en 1047, suivant la Chronique de Quimperlai, les seigneurs bretons enlevèrent Conan, qui fut couronné l’année suivante à Rennes : il n’avait encore que huit ans. Cependant Eudon continua de gouverner, tantôt avec le titre de comte, tantôt avec celui de duc. Enfin ce tuteur ambitieux et turbulent prit les armes, et voulut se faire reconnaître souverain. Il fut vaincu, l’an 1057, par le jeune prince. Geoffroi, fils d’Eudon, eut dans la suite le même sort, et Conan se vit, en 1062, paisible possesseur du duché de Bretagne. Lorsque Guillaume, duc de Normandie, projetait la conquête de l’Angleterre, Conan refusa de lui prêter serment de fidélité, et de lui rendre hommage, comme l’avaient fait ses prédécesseurs. Il prétendit même que Guillaume devait lui remettre le duché de Normandie, « qui lui appartenait, disait-il, puisqu'il était petit-fils de Havoise, sœur de Richard II. » Conan leva des troupes, s’avança jusqu'à Dol ; mais, à l’approche de Guillaume, il se retira. Ces deux princes parurent alors plusieurs fois chercher et éviter le combat. Conan assiégeait Château-Gontier, lorsqu’il mourut subitement, le 11 septembre 1066. Guillaume de Jumiéges, d’Argentré et D. Morice rapportent que le duc de Normandie, inquiet de voir ses États menacés d’une invasion, au moment même où il n'attendait qu’un vent favorable pour descendre en Angleterre avec sa flotte de près de 5 000 vaisseaux, corrompit un chambellan du duc de Bretagne, et que ce traître empoisonna les gants de son maître et la bride de son cheval. « Conan était, dit d’Argentré, un jeune prince de grande espérance, hardi, libéral, doux, aimant la justice, toujours conduit par la raison, adroit à tous les exercices, et doué de toutes les vertus. » Il fut enterré à Rennes, dans l’abbaye de St-Melaine.


CONAN III, dit Le Gros, duc de Bretagne, fils d'Alain Fergent, lui succéda l’an 1111, et épousa Mathilde, fille de Henri Ier, roi d’Angleterre. Henri, étant en guerre avec Louis le Gros, envoya demander du secours à son gendre ; mais Conan se déclara contre lui, et joignit ses armes à celles de Louis ; il le suivit aussi deux fois dans ses expéditions en Auvergne. Quoique l’empereur Henri eût épousé une sœur de Mathilde, Conan conduisit 10 000 Bretons sur les frontières d’Allemagne, et arrêta les Impériaux qui menaçaient d’entrer sur les terres de France. Il convoqua, l’an 1115, à Nantes, un concile, où il fut réglé que les enfants qui naîtraient d'un mariage incestueux seraient inhabiles à succéder ; que les biens ecclésiastiques, qui se partageaient alors et se vendaient comme les autres biens, ne seraient plus héréditaires dans les familles, et que le droit du bris serait supprimé. Ce droit barbare consistait à piller les navires que la tempête ou le hasard jetait sur les côtes de l’Armorique. Conan fit dans la suite, avec les marchands étrangers, un traité dont les conditions furent que, moyennant une certaine somme, on leur délivrerait un passeport appelé bref de sauveté, de conduite et de victualité, et on leur fournirait des locmans ou pilotes côtiers. Cette coutume fut mise en usage l'an 1127, et l’on établit à la Rochelle, à Bordeaux, et dans d'autres ports, des bureaux pour percevoir les droits. Conan mourut le 17 septembre 1148, à l'âge de 50 ans. Ce prince religieux alla voir St. Bernard en Bourgogne, et reçut son frère Nivard, qui amena une colonie de Cisterciens dans ses États. Il désavoua, dans ses derniers moments, Hofl, fils de son épouse Mathilde, et déclara qu’il n'était point le sien. Cette déclaration fut la source des guerres civiles qui désolèrent la Bretagne pendant cinquante ans, et qui firent passer successivement ce duché dans les maisons de Penthièvre, d’Angleterre, de Thouars et de France.


CONAN IV, duc de Bretagne, que la faiblesse de son règne fit surnommer CONAN LE PETIT, descendait de Conan, dit le Gros, par sa mère. Il disputa par les armes le duché de Bretagne à Eudon, son beau-père, fut vaincu par lui, passa en Angleterre, obtint des secours du roi Henri II, et revint, l’an 1155, combattre son rival. Il assiégea et prit Rennes, défit Eudon, qui fut fait prisonnier. Alors tous les seigneurs se rassemblèrent autour de Conan, le reconnurent pour duc de Bretagne, et lui firent hommage de leurs terres. Eudon, devenu libre, mais abandonné de ses amis, se réfugia à la cour de Louis VII. Cependant les Nantais, qui avaient reconnu pour souverain ce même comte Hoël, que Conan III désavoua pour son fils, se donnèrent ensuite à Geoffroi, comte d'Anjou, frère de Henri, roi d'Angleterre ; mais Geoffroi étant mort, l’an 1158, Conan, qui n'avait osé le troubler dans la possession de Nantes, s’empara de cette ville. Le roi Henri prétendit qu’elle devait lui appartenir par droit de succession ; il passa la mer, menaça Conan d'entrer en Bretagne avec ses troupes, et Conan lui céda la ville de Nantes avec tout le terrain qui est entre la Loire et la Vilaine. Ce prince épousa bientôt après Marguerite, sœur de Malcolm, roi d’Écosse. Eudon, ayant pris le titre de comte de Vannes et de Cornouailles, forma une nouvelle ligue avec plusieurs seigneurs, et recommença la guerre contre Conan. Ce duc, trop faible pour résister à ses ennemis, implora le secours du roi d'Angleterre. Henri se rendit en Bretagne, soumit tous ceux qui avaient pris les armes, et songea bientôt à réunir la Bretagne aux provinces de Normandie, d’Aquitaine, de Gascogne, de Poitou, d’Anjou, de Touraine et du Maine, qu’il possédait en France. Il proposa le mariage de Geoffroi, son troisième fils, qui n’avait que huit ans, avec Constance, fille unique de Conan, et qui n'en avait que cinq : le mariage fut conclu. Les deux époux ne devaient entrer en jouissance de tout le duché qu’après la mort de Conan et d'Eudon ; mais il fut stipulé que, jusqu’à ce temps, ils