Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 1.djvu/27

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avait pu voir ce qu’il y a de misères au fond de la royauté, et qui y revenait comme à un festin !

Un vent léger nous poussait vers l’entrée du détroit, et nous avions devant nous le phare de Messine, lorsqu’il nous est arrivé une barque avec des rameurs siciliens, chargés de diriger les navires dans ces parages dangereux. Le chef de ces rameurs, après nous avoir complimentés, nous a dit d’un ton solennel : Voilà Scylla et voilà Carybe. Du côté de Scylla, on entend encore le sourd mugissement des vagues ; tout paraissait tranquille autour de Carybe. Ces deux écueils, au moins dans les temps de calme, n’ont rien qui puisses expliquer la terreur des anciens. Nous sommes entrés paisiblement dans le canal, et nous avons put jouir du magnifique spectacle des deux rives. Dans le lointain, et à notre droite, c’étaient les mont Pelores, dont les cimes bleuâtres conservent encore des traces des frimas ; près de nous, des vallons où la pâle verdure des oliviers se mêle au vert foncés des pins et des cyprès. À mesure qu’on avance dans le détroit, on distingue quelques maisons blanches sur un terrain jaunâtre, des lits de torrens qu’on prend d’abord pour des chemins poudreux, une certaine culture qui annonce le voisinage d’une grande ville, enfin plusieurs églises ou monastères dont les paisibles habitans ne songent guère que leurs demeures servent de points de reconnaissance aux navigateurs poussés par la tempête. Sur la rive de la Calabre,