Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 1.djvu/344

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et qui, après avoir fait trois campagnes en Morée, sous le drapeau des Philhellènes, va offrir ses services au sultan Mahmoud ; pendant son séjour en Grèce, il a appris un peu de grec moderne, et les maux qu’il a soufferts pour la cause de l’indépendance l’ont aguerri contre les misères et les privations d’un voyage par terre en Turquie. L’autre compagnon, qui s’appelle Michel, est de la vallée d’Aost en Piémont ; il se vante de savoir le turc, l’arabe, le grec moderne ; le fait est qu’il ne parle que le patois de la vallée d’Aost ; mais il arrange si bien les intonations de sa voix, il modifie tellement son accent qu’il a vraiment l’air de parler plusieurs langues différentes. Il m’a rappelé un M. Lebrigand que j’ai vu dans ma jeunesse, et qui se vantait de parler douze cents langues, quoiqu’il ne connût guères que le Bas-Breton. Michel, outre le don des langues, a pour nous le mérite d’avoir été cuisinier à bord du brick français le Génie et nous a offert ses services pendant la route. Le grec Dimitri que nous avons pris à Baba pour nous accompagner jusqu’aux Dardanelles, est un pauvre habitant de Mételin, craignant Dieu et les musulmans, vrai philosophe pratique, résigné en toutes choses à sa destinée. Dimitri parle un peu la langue italienne, à l’aide de laquelle nous nous faisons entendre de lui ; mais il a un grand défaut pour un interprète, celui de ne pas écouter ce qu’on lui dit, et d’arranger selon ses propres idées les ques-