Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 2.djvu/148

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

prême de l’empire. Lorsque tout tombait en décadence et que l’empire grec, selon l’expression de Montesquieu, unissait comme le Rhin, il y eut parfois deux capitales, et l’une de ces capitales était Sélivrée.

Notre, caïque a remis à la, voile vers les cinq heures du soir ; les vents étaient toujours contraires, et nous n’avons pu faire que trois ou quatre milles de chemin avant la nuit. Les ténèbres couvraient la mer et la rive, quand nous sommes entrés dans le port d’Ovat. La petite cité d’Ovat est toute peuplée de Grecs. Notre caloyer était attendu dans ce lieu comme le Messie : une foule de Grecs sont venus au-devant de lui sur le port ; les uns lui baisaient les mains, les autres se mettaient à genoux pour lui demander sa bénédiction. Chacun aspirait à l’honneur de le recevoir chez lui, et semblait lui dire comme dans l’Évangile : Entrez dans ma maison, et mon âme sera guérie. Je me suis approché pour lui faire mes adieux, car il allait nous quitter. Je n’ai plus retrouvé en lui cet air de modestie et de douceur qu’il nous avait montré jusque-là. Nous avions ri quelquefois de son ignorance et de sa crédulité puérile ; mais au milieu de son triomphe, il nous a regardés à son tour avec une sorte de dédain. Chacun de ses regards semblait nous dire : Vous voyez que notre ignorance vaut bien vos lumières, puisqu’on nous respecte et qu’on nous aime. J’avoue que j’étais un peu