Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 2.djvu/181

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cendiaires des discours par lesquels on prêche la sédition et le désordre ; nous ne prenons la chose qu’au figuré, et les Osmanlis la prennent à la lettre.

Constantinople, au moment d’un incendie, présente un spectacle qui révèle à lui seul le caractère et les mœurs du pays ; des tambours énormes retentissent sur des tours élevées, la voix sinistre des passavans annonce le désastre. Le grand-visir, les ministres du divan, le sultan lui-même, arrivent au lieu de l’incendie ; tandis qu’on lutte contre les progrès du feu, on entend l’horrible bruissement des flammes, les toits qui croulent, les poutres qui se brisent et qui tombent ; et ce qu’il y a de plus extraordinaire, c’est qu’en présence de cet affreux spectacle, tout le peuple garde le plus profond silence ; les femmes et les enfans ne poussent point de cris ; ceux même que l’incendie atteint restent calmes, et prennent à peine le soin de sauver quelques meubles ; la vue de leurs maisons en flammes ne les émeut point ; on m’a cité des traits de cette philosophie musulmane qui m’ont rappelé le sage d’Horace : Impavidum ferient ruinæ.

La plupart des incendiés reçoivent l’hospitalité dans les quartiers qu’a respectés le feu ; ceux qui ne trouvent point d’asile se résignent comme les autres, surtout pendant la saison où la température et la douceur du climat leur permettent de coucher à la belle étoile. À peine quelques jours se sont écoulés,