Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 2.djvu/400

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de nouvelles grâces de la Providence, en prenant les moyens convenables pour épurer la foi des Musulmans et rendre à la religion tout son éclat ; cela voulait dire qu’il fallait se débarrasser des derviches Bektachis. Le firman condamnait à la peine capitale les trois chefs de l’ordre, Candji-baba, Ahmed et Saleh ; les deux premiers étaient habitans de Scutari. Une assemblée tenue dans la mosquée du sérail décréta l’exil d’un grand nombre de Bektachis et la destruction de la plupart de leurs tékés ; ceux qui obtinrent de rester à Constantinople eurent défense de se montrer sous le costume de derviches.

En démolissant des tékés à Stamboul, on ne fut pas fâché d’y trouver des vases remplis de vin ; on découvrit, dit-on, dans la maison du chef Candji-Baba à Scutari des pots de vin bouchés avec des feuillets du Coran. Du reste nous devons nous défier de tout ce qui a été répété contre les derviches exilés ; quand on veut justifier des mesures violentes, on n’épargne point les exagérations. Lorsque chez nous on a frappé les chevaliers du Temple et les disciples de Loyola, n’en a-t-on pas dit plus qu’on n’en savait ? Toutefois la suppression des Bektachis n’a pas produit en Turquie autant d’effet qu’en a produit en France la suppression des jésuites ; personne n’a songé à souffler sur la cendre des derviches pour la ranimer, personne n’a pensé à relever les tékés abattus ni à solliciter le rappel des proscrits. Si les malheureux