Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 2.djvu/399

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demandé à voir ces ardens disciples de Bektach, mais on nous a dit qu’ils avaient été supprimés dans ces derniers temps ; un Musulman m’a montré les débris de quelques-uns de leurs tékés, et voici les détails que j’ai pu recueillir sur la suppression de cet ordre. Il n’est point de crimes dont on n’ait chargé la mémoire des Bektachis. Ils n’observaient point le jeune de Ramazam, ils buvaient même du vin-dans ces jours d’abstinence. La débauche remplaçait dans leurs tékés les prières de la religion, et pendant les nuits de moharrem appelées nuits de deuil, ils chantaient des poésies à la louange du vin. On put se convaincre qu’ils professaient des doctrines hérétiques par la lecture d’un petit livre qu’on trouva dans la poche d’un de ces derviches. On en vint jusqu’à reprocher aux Bektachis d’enlever les jeunes garçons et les jeunes filles. Après les délits d’impiété et d’immoralité venaient les délits politiques. Les Bektachis s’étaient, disait-on, réunis aux janissaires ; beaucoup d’entre eux avaient été vus, le 16 juin, dans les rangs de la milice rebelle sur la place de l’Et-Méidan, et quelques-uns avaient parcouru Stamboul pour enflammer le fanatisme de la multitude. La ruine des Bektachis devait donc suivre la ruine de l’Odjac ; tous les bons Musulmans étaient censés réclamer cette mesure. Un firman de Mahmoud annonça aux vrais croyans qu’après avoir purgé l’empire de la présence des janissaires, il fallait songer à mériter