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Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 2.djvu/424

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jusqu’à Constantinople. Vous apprendrez avec plaisir que notre philhellène Franc-Comtois, qui s’est battu pendant trois ans pour l’indépendance des Grecs de la Morée, vient d’obtenir du service dans les nouvelles milices du sultan ; le voilà monté au rang de sous-instructeur dans l’armée impériale. Il est venu nous voir à Péra avec le tarbouch rouge, avec la veste et le pantalon de drap bleu, prescrit par les derniers réglemens. Notre pauvre Piémontais Michel a été moins heureux : il croyait trouver un asile chez un oncle, négociant à Galata ; mais au moment où il arrivait à Constantinople, son oncle partait pour l’éternité, ne laissant dans ce monde que des dettes. Le pauvre Michel aurait bien voulu trouver une place où il pût exercer ses talens ! Pourquoi le cuisinier du brick le Génie n’aurait-il pas été reçu dans les cuisines impériales comme notre Franc-Comtois dans l’armée de sa Hautesse ? Michel en était à regretter que la civilisation n’eût pas fait encore assez de progrès pour qu’il fût placé convenablement dans la capitale des Turcs. Pour comble de malheur, la fièvre est venue le saisir ; nous l’avons vu, ces jours derniers, pâle, maigre, découragé. Ce n’était plus ce Michel qui, robuste et joyeux, nous devançait dans tous les gîtes, et s’en allait chaque jour à la découverte dans les montagnes de l’Anatolie et sur le rives de l’Hellespont ; la tristesse était peinte sur sa figure, son œil était morne, ses jambes suppor-