Mais, pour accomplir ce dessein, reconnaissant bientôt l’insuffisance de mes forces, je réprimai ce téméraire désir, et l’écueil m’a rendu plus sage.
Comment oser comparer mes œuvres périssables à ces divines faveurs que vous savez dispenser ? Tout leur cède : talent, génie, audace même.
Car il n’est pas au pouvoir d’un mortel de rien produire d’assez beau, ni d’assez précieux, pour dignement reconnaître d’aussi célestes dons.
Qu’il est doux, le festin de ces fleurs dont ta blonde chevelure est ornée ! Avec quel orgueil l’une d’elles semble jouir des baisers qu’elle prodigue, la première, à ton front !
Cette robe qui, tout le jour, te couvre de ses plis amoureux ; ces parures d’or qui, de chaque côté, tombent en caressant à la fois ton col et ton visage, ont-elles un sort moins désirable ?
Mais plus heureux encore, dans ses contours voluptueux, est le ruban qui touche et qui presse ce beau sein sur lequel il s’enlace.
Ah ! si, dans la ceinture même qui se noue autour de ta taille, on croit voir le désir de ne s’en jamais détacher, que serait-ce des bras d’un amant ?
Lorsque, par l’ordre du ciel, la mort ravit au monde celle pour qui j’ai tant soupiré, ceux qui l’avaient connue versèrent des larmes ; la nature, dont elle était le plus bel ouvrage, parut dans la consternation.
O destinée contraire à mon amour ! Espérance trompeuse ! O esprit pur, dégagé de tous liens ! où es-tu maintenant ? La terre recouvre ton beau corps, et le ciel a reçu ton essence divine.
En vain, la mort cruelle, inattendue, crut pouvoir éteindre avec toi jusqu’au renom de tes vertus : le fleuve d’oubli n’engloutira point ta mémoire.
Privé de toi, le monde possède encore mille écrits qui t’immortalisent, et ses regrets s’adoucissent en pensant que tu quittas cette terre pour aller habiter les cieux.
Ils sont rompus, ces liens qu’en apparence l’amour avait formés indestructibles. Un froid mortel a remplacé dans mon sein le feu qui m’embrasait, et mes joies se sont changées en douleurs.
Ce premier amour, qui apporta tant de soulagement à mes peines, oppresse maintenant mon cœur ; et, semblable au corps défaillant qu’un reste de vie abandonne, je demeure immobile et glacé.
Mort impitoyable ! que tes coups auraient de douceur pour de tendres amants, si, quand tu frappes l’un d’eux, l’autre aussi touchait à sa dernière heure !