Page:Michel - Contes et légendes.djvu/30

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« Toi qui passes pour si savant, disait Margot à son fils, tâche donc de guérir ton père de sa tristesse. »

André faisait bien tout ce qu’il pouvait, mais il n’avançait guère.

Il aurait raconté pendant dix ans tous ses meilleurs tours de collège, que Blaise se fut contenté de l’écouter gravement, car il contait bien, mais sans pour cela sourire aucunement.

En désespoir de cause, Rose alla, sans rien dire, trouver la vieille Jeannette.

C’était une paysanne qui avait près de cent ans.

Par conséquent, ayant bien des fois vu naître et mourir pères, enfants et petits enfants ; connaissant l’histoire de chaque famille elle donnait quelquefois d’excellents conseils, ce qui la faisait passer pour très-habile.

Rose alla donc consulter Jeannette pour la tristesse de son père.

« Dame, ma fille, dit la vieille, je savons ben pourquoi ; mais il ne serait pas prudent de te le dire. »

Rose insista tellement, elle promit si bien le secret, et puis au fond la vieille Jeannette désirait tant raconter à la fillette tout ce qu’elle savait et chercher ensemble les moyens de guérir son père, qu’elle consentit.

« Mon grand-père m’a raconté, dit-elle, qu’il fut un temps où dans ce village la disette fut telle que ceux qui avaient un peu de terre donnaient, quand ils avaient des enfants, le champ entier pour un sac de blé, ou même d’orge, ou de sarrazin. »

Rose frissonnait ! Le grand−père de Jeannette, qui avait