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Page:Michel - Contes et légendes.djvu/44

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c’est qu’il riait souvent de tout son cœur des travers du genre humain, des siens comme de ceux des autres.

Un hiver que les récoltes avaient été mauvaises, ne s’avisa-t-il pas de faire un atelier pour les mères de famille, afin qu’elles pussent mettre quelques sous au bout de la chétive épargne de l’année ?

Il se garda bien de parler de son projet avant de l’avoir effectué, car il savait bien que dans les campagnes on s’imagine de suite qu’il faut une grosse somme d’argent et quant à l’intelligence on n’y songe pas.

On était au moment où il devait toucher son trimestre d’instituteur ; il en employa une partie à acheter des étoffes chaudes et à bon marché et de la laine à tricoter ; une seconde partie à payer aux plus pauvres femmes du village la façon des bas et des étoffes en vêtements.

Il fit revendre à la ville ces choses confectionnées, le prix en était plus que triplé. Avec cet argent il put acheter d’autres étoffes, d’autre laine, payer la façon à un plus grand nombre d’ouvrières. Le tout fut revendu confectionné à la ville comme la première fois.

Au bout d’un mois il avait de quoi monter un atelier nombreux. Des commandes lui arrivèrent ; il les donnait bien entendu à ses ouvrières sans nul bénéfice pour lui. Bientôt on eut de quoi faire venir des maîtresses d’ouvrage de la ville afin de perfectionner les couturières du village et, à l’heure qu’il est, l’atelier du père Remy entretient encore l’abondance dans le village, quoiqu’il soit mort depuis plus de trente ans ; car son fils et sa fille se sont partagé la besogne ; le fils a les classes, la fille a l’atelier, l’asile et la