Page:Michel - La Commune, 1898.djvu/109

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Les gardes nationaux qui n’avaient pas pris de munitions commençaient à le regretter.

Une journée se préparait, nous n’en pouvions douter ; — que serait le lendemain ? l’Hôtel-de-Ville était depuis la veille plein de sacs à terre ; les mobiles bretons dont il regorgeait entassés à l’embrasure des fenêtres nous regardaient, leurs faces pâles immobiles, leurs yeux bleus, fixés sur nous avec des reflets d’acier.

Pour eux la chasse aux loups est ouverte.

Car Monsieur Trochu a dit à ceux d’Ancenis :
Mes amis,
Le roy va ramener les fleurs de lys.

Comme au 31 octobre la foule arrivait toujours.

Derrière la grille, devant la façade était le lieutenant-colonel des mobiles, Léger, et le gouverneur de l’Hôtel-de-Ville Chaudey, dont on se défiait.

— Les plus forts, avait-il dit, fusilleront les autres.

Le gouvernement était en possession des forces les plus grandes.

Des délégués furent envoyés, disant que Paris affirmait encore sa volonté de ne jamais se rendre et de ne jamais être rendu ; ils demandèrent vainement à être introduits, toutes les portes étaient fermées. Les bretons étaient toujours aux fenêtres.

L’Hôtel-de-Ville à ce moment ressemblait à un navire, ses sabords ouverts sur l’océan, les vagues humaines eurent d’abord de grands remous, puis elles attendirent immobiles.

Nul ne doutait plus de la façon dont le gouvernement allait recevoir ceux qui ne voulaient pas de la reddition, traînant après elle Badingue remorqué par Guillaume, ou même n’y traînant que la honte : c’était trop.

Tout à coup Chaudey entra dans l’Hôtel-de-Ville ; il