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— Oui, lui dis-je, c’est moi, vous pouvez le raconter, cela fera bien dans le tableau et du reste je n’ai aucune envie de me défendre.

— Est-ce que vous nous prenez pour des mouchards ? s’écria-t-il avec une véritable indignation.

C’était au moment où l’égorgement finissait à peine, nous étions sous l’impression d’une intense horreur, je lui dis cruellement :

— Vous êtes bien des assassins !

Il ne répondit pas, je compris que beaucoup d’entre eux avaient été indignement trompés — et que quelques-uns commençaient à avoir des remords.


IV

proclamation de la commune
Ils étaient là debout, prêts pour le sacrifice.
(Bardes Gaulois.)


La proclamation de la Commune fut splendide ; ce n’était pas la fête du pouvoir, mais la pompe du sacrifice : on sentait les élus prêts pour la mort.

L’après-midi du 28 mars par un clair soleil rappelant l’aube du 18 mars, le 7 germinal an 79 de la République, le peuple de Paris qui, le 26, avait élu sa Commune inaugura son entrée à l’Hôtel-de-Ville.

Un océan humain sous les armes, les baïonnettes pressées comme les épis d’un champ, les cuivres déchirant l’air, les tambours battant sourdement et entre tous l’inimitable frappement des deux grands tambours de Montmartre, ceux qui la nuit de l’entrée des Prussiens et le matin du 18 mars, éveillaient Paris, de leurs baguettes spectrales, leurs poignets d’acier éveillaient des sonorités étranges.