Page:Michel - La Commune, 1898.djvu/202

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dans le volume de Baudelaire la pièce intitulée : La charogne ; le café était presque achevé, quand les gardes nationaux se jettent sur nous, nous ôtent violemment en criant :

— Sacré nom de Dieu ! en voilà assez.

Au même moment l’obus tomba brisant les tasses restées sur la plate-forme, réduisant le livre en impalpables miettes.

— Cela donne pleine raison à mes calculs, dit l’étudiant en secouant la terre dont il était couvert.

Il resta encore quelques jours, je ne l’ai jamais revu.

Les seuls que j’aie vus sans courage pendant la Commune sont un gros bonhomme venu pour inquiéter la jeune femme qu’il venait d’épouser, et qui fut tout heureux d’emporter à Eudes un mot de moi le priant, de le renvoyer à Paris. J’avais abusé de sa confiance en mettant à peu près ceci :

« Mon cher Eudes,

» Pouvez-vous renvoyer à Paris cet imbécile, qui serait bon à jeter ici des paniques s’il y avait des gens capables d’en avoir. Je lui fais prendre les coups de canon du fort pour ceux de Versailles, afin qu’il se sauve plus vite ; seriez-vous assez bon pour le renvoyer. »

Nous ne l’avons jamais plus revu tant il avait eu peur.

Si, à l’entrée de l’armée de Versailles il avait conservé son uniforme de fédéré, il aura été fusillé sur le tas avec les défenseurs de la Commune, il y en eut bien d’autres.

L’autre du même genre, était un jeune homme. Une nuit que nous étions une poignée à la gare de Clamart, et que justement l’artillerie de Versailles faisait rage, l’idée de se rendre le prit comme une obsession, il