Page:Michel - La Commune, 1898.djvu/273

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quand les Versaillais seront entrés ; car nous sentons bien qu’ils entreront, tout en répétant : Paris vaincra ! ce dont nous sommes sûrs, c’est qu’on se défendra jusqu’à la mort.

Sur la porte de la mairie, des fédérés du 61e nous rejoignent.

— Venez, me disent-ils, nous allons mourir, vous étiez avec nous le premier jour, il faut y être le dernier.

Alors, je fais promettre au vieux Moreau que la butte sautera, et je m’en vais avec le détachement du 61e au cimetière Montmartre, nous y prenons position.

Quoique bien peu, nous pensions tenir, tenir longtemps.

Nous avions par places crénelé les murs avec nos mains.

Les obus fouillaient le cimetière devenant de plus en plus nombreux.

L’un de nous dit que c’était surtout le tir de la butte, qui, étant trop court, tombait sur nous, au lieu d’aller jusqu’à l’ennemi ; dès le 17 mai, on avait reconnu que ce tir était mauvais, et pendant la matinée, sans doute pour ce motif, on ne s’en était pas servi.

Presque tous les fédérés blessés l’étaient par la butte, on en avertit en les emportant à l’ambulance.

La nuit était venue, nous étions une poignée bien décidés.

Certains obus venaient par intervalles réguliers ; on eût dit les coups d’une horloge, l’horloge de la mort. Par cette nuit claire, tout embaumée du parfum des fleurs, les marbres semblaient vivre.

Plusieurs fois nous étions allés en reconnaissance, l’obus régulier tombait toujours, les autres variaient.

Je voulus y retourner seule, cette fois l’obus tombant tout près de moi, à travers les branches me couvrit de fleurs, c’était près de la tombe de Mürger. La figure blanche jetant sur cette tombe des fleurs de marbre, faisait un effet charmant, j’y jetai une partie des