Page:Michel - La Commune, 1898.djvu/317

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Un jour, après cette même question et à cette même réponse, le capitaine Briot me dit : — Vous n’avez pas d’oncle ?

— Non, lui dis-je encore. Mais comme il avait tiré la lettre de l’enveloppe, je voyais de côté, étant debout près du bureau. Mon oncle était arrêté, mais ne voulait pas que je change en rien la façon dont j’agirais, comme s’il ne l’était pas.

Mes deux cousins, Dacheux et Laurent, étaient arrêtés également, le premier avait quatre petits enfants.

— Vous voyez bien, dis-je à Briot, que j’avais raison de nier ma famille, puisqu’on arrête tous les nôtres.

La mère d’Excoffons nous appela un jour près d’elle à une dizaine ; on s’assit par terre et avec mille précautions pour ne pas attirer l’attention, elle nous montra des cartes (chose prohibée) et rangées d’une certaine manière.

Une arrivante, mal fouillée sans doute, lui avait fait ce cadeau.

— Je n’y crois pas plus que cela, dit-elle, mais c’est une drôle de chose.

Quelle terrible revanche de la Commune sur l’armée, la magistrature, une victoire populaire ! Et lisant dans sa pensée bien plus que sur les cartes elle disait : Dans longtemps, longtemps, comme ce sera terrible !

À ce moment on commença à appeler les plus mauvaises, pour les envoyer à la correction de Versailles.

Michel Louise !
Gorget Victorine !
Ch. Félicie !
Papavoine Eulalie !

À ce nom, celui qui appelait gonflait sa voix, la pauvre fille n’était pas même parente du célèbre Papavoine, mais cela faisait bien dans le tableau. Nous étions quarante. Le lieutenant Marceron, pour inau-