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raient de mourir à leur poste, se déclaraient prêts au sacrifice de leur vie. L’image même de la mort devenait familière. Dans les rues de Caen, Charlotte voyait souvent passer l’étendard d’une société populaire, assez rude et turbulente, mais dévouée à la cause girondine, les Carabots. Au-dessous de leur devise, « L’exécution de la Loi ou la Mort », une tête de squelette, posée sur deux fémurs en croix, se détachait en noir sur l’étoffe blanche. Les Carabots portaient même en brassard cette lugubre image. Or, elle n’étonnait plus. Les Carabots avaient raison : l’exécution de la Loi ou la Mort.

Certes, Charlotte admirait tout particulièrement les dures mœurs de Rome et de Sparte, telles qu’elles lui apparaissaient à travers l’histoire et la tragédie. Ses amies ne la raillaient-elles pas de les citer trop souvent en exemple ? Mais elle n’était pas seule à s’en inspirer. Tout le monde, autour d’elle, célébrait les héros antiques, si prompts à mourir ou à tuer pour une grande cause. Ainsi elle admirait Brutus, immolant à la liberté César, pourtant son bienfaiteur et peut-être son père. Elle savait par cœur des passages entiers du Brutus de Voltaire. Mais tout le monde pre-