siècles pourraient unir les nations, de même qu’ils ont soudé entre elles des provinces jadis ennemies, comme la Neustrie et l’Austrasie, qui s’appellent aujourd’hui la France ? Allons donc ! On l’a détourné de ces hautes espérances, on lui en a montré le péril et la vanité, on lui a hurlé qu’elles étaient dérisoires, chimériques ou criminelles… Et vous vous étonnez que votre fils aime la guerre ! »
Pendant l’été 1915, Paron garde cette attitude de gêne irritée. Il refuse d’aller à Ganville où Mme Ciboure l’a invité. Il lui écrit rarement, de courtes lettres. Aussi, à son retour à Paris, veut-elle dissiper ce malentendu, percer le secret de ce malaise insaisissable et certain. Il se dérobe encore. Elle insiste. Il balance. Enfin, moitié railleur, moitié sérieux :
— Eh bien, tenez, je vous écrirai. Oui, je vous écrirai.
Quelque temps plus tard, elle reçoit en effet une longue lettre de Paron, qui est en voyage. La voici :
« Vous allez vite comprendre mes hésitations, ma gêne. Je crois avoir enfin une vue nette sur les origines de la guerre. C’est elle qui vous expliquera mes scrupules et mon embarras. Oh ! cette vue, je ne l’ai pas découverte de moi-même.