Page:Michel Corday - La Houille Rouge, 1923.djvu/90

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marine. Elles rient. Elles chantent. Ou bien, sur l’air des « Lampions », elles réclament : « Nos vingt sous, nos vingt sous. »

D’autres corps de métier ont suivi. Aujourd’hui, par hasard, j’ai assisté à des manifestations plus graves, vers la place de la République. Le boulevard, en ces parages, avait un aspect inaccoutumé. De ci, de là, sur le trottoir, un vieux chanteur, accompagné par deux ou trois violons, au milieu d’un cercle religieux d’auditeurs, disait une chanson qui s’achevait par : « Vive la grève. »

Sur la place, même effervescence. Des cortèges se forment à la Bourse du Travail, toute proche. Des pancartes, à l’extrémité d’un bâton souvent orné d’un bouquet, servent de signe de ralliement : « Bijoutières. Fleuristes. Plumassières. »

Une petite troupe passe, ardente et sévère. Beaucoup de très jeunes hommes, l’insigne de la croix de guerre ou des réformés au veston. Ce sont des grévistes, employés de restaurants ou de cafés. Ils s’arrêtent devant chaque établissement encore ouvert, afin d’entraîner leurs camarades. Un groupe y pénètre. Les autres crient : « Tabliers ! Tabliers ! » Les délégués sortent, annoncent que le personnel se met en