ment et que la vie d’hôtel, en plein été, soit animée d’un continuel défilé de touristes, les journées me semblent longues. Mais je me gronde. Un temps ne viendra-t-il pas où je les regretterai, ces heures solitaires, un temps où je ne pourrai plus me dire : « Je vais le voir tout à l’heure. »
Je lisais le conte d’un journal. Ma stupeur grandissait à chaque ligne. Le personnage principal ne tenait-il pas, sur la guerre, des propos humains, généreux, pleins de sagesse et de pitié ? Je me demandais comment la censure avait pu tolérer un langage si contraire à l’orthodoxie. Le dernier mot me livra la clef de l’énigme : cet homme sensible et sensé était un eunuque…
Telles sont les gentillesses dont on farcit quotidiennement les cervelles, sous le couvert innocent de la littérature. N’ai-je pas lu un jour cette farouche invention d’un doux et charmant conteur : une femme, convaincue que son mari fait des signaux à l’ennemi, arme d’un fusil son petit garçon de dix ans et fait tuer le père par le fils.