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LES « HAUTS FOURNEAUX »

lioration de la poste aux armées, parce que les lettres amollissent les hommes ?

Cette jeune femme contait gentiment ses aventures. Elle avait échappé aux terribles commandants d’armes, aux contrôles des gares, aux gendarmes, elle avait voyagé en carriole, à pied, même dans une auto postale, blottie parmi les sacs de dépêches. Au village de repos où cantonnait son mari, sergent d’infanterie, on lui fit fête. Les hommes embrassaient son manchon. Ils s’emparaient de son sac à main, déclarant qu’ils n’en avaient pas vu depuis six mois. Ils avaient même ouvert la petite boîte à poudre de riz, la reniflaient, en extase, criant : « Oh ! Ça sent la poudre ! »

Mais, quand nous fûmes seules, elle me dit les plaintes de ces hommes : la durée indéfinie, la fatigue, les trop rares relèves, la boue où ils s’enlisent parfois jusqu’au cou, les attaques où on les envoie se faire tuer par petits paquets, et qu’ils jugent inutiles. Et c’est peut-être aussi pour que ces choses restent ignorées qu’on traque si âprement les petites épouses…