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Page:Michel Millot - L’Escole des filles, 1790-1800.djvu/41

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L’ESCOLE DES FILLES.

Fanchon. Dites-le moy donc, de grâce, afin que je l’apprenne.

Susanne. Voilà ce que c’est d’escouter toujours une mère et prester jamais l’oreille aux paroles des hommes.

Fanchon. Et qu’est-ce que les hommes nous apprennent tant, ceux-là qu’on dit estre si méchants.

(4) Susanne. Hélas ! je le sçay depuis peu, ce qu’ils nous apprennent, à mon grand plaisir. Ils ne sont pas si meschants que tu penses, mon enfant, mais tu es aussi esloignée de le sçavoir qu’un aveugle de voir clair, et tant que tu seras privée de leur compagnie et de leurs conseils, tu seras toujours dans une stupidité et ignorance qui ne te donnera jamais aucun plaisir au monde. Car, dis-moy, en l’estat où tu es, comme une fille qui est toujours avec sa mère, quel plaisir as-tu que tu me puisses dire ?

Fanchon. Quel plaisir ? j’en ay plusieurs, ma cousine. Je mange quand j’ay faim, je bois quand j’ay soif, je dors quand j’ay sommeil, je ris, je chante, je danse, je saute, je vais me promener quelquefois aux champs avec ma mère.

Susanne. Tout cela est bel et bon, mais tout le monde n’en fait-il pas de même ?

Fanchon. Et comment donc, ma cousine, y