Page:Michelet - Histoire de France - Lacroix 1880 tome 1.djvu/30

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
xx
HISTOIRE DE FRANCE.

le vrai fond de son dogme. C’est dur, mais il lui faut mourir en cela même, accepter franchement sa pénitence, sa purification, et l’expiation de la mort.


Des sages me disaient : « Ce n’est pas sans danger de vivre à ce point-là dans cette intimité de l’autre monde. Tous les morts sont si bons ! Toutes ces figures pacifiées et devenues si douces, ont des puissances étranges de fantastique illusion. Vous allez parmi elles prendre d’étranges rêves, et qui sait ? des attachements. Qui vit trop là, en devient blême. On risque d’y trouver la blanche Fiancée, si pâle et si charmante, qui boit le sang de votre cœur ! Faites au moins comme Énée, qui ne s’y aventure que l’épée à la main pour chasser ces images, ne pas être pris de trop près (Ferro diverberat umbras). »

L’épée ! triste conseil. Quoi ! j’aurais durement, quand ces images aimées venaient à moi pour vivre, moi je les aurais écartées ! Quelle funeste sagesse !… Oh ! que les philosophes ignorent parfaitement le vrai fond de l’artiste, le talisman secret qui fait la force de l’histoire, lui permet de passer, repasser à travers les morts !

Sachez donc, ignorants, que, sans épée, sans armes, sans quereller ces âmes confiantes qui réclament la