L’Esprit, faible colombe, semble périr alors, s’évanouir. Il est dès ce moment dans l’air, et se respirera partout.
Même en ce petit livre, monastique et dévot, de l’Imitatio, vous trouvez des passages d’absolue solitude où manifestement l’Esprit remplace tout, où l’on ne voit plus rien, ni prêtre ni Église. Si l’on entend ses voix intérieures aux couvents, combien plus aux forêts, dans la libre Église sans bornes ! — L’Esprit, du fond des chênes, parlait quand Jeanne d’Arc l’entendit, tressaillit, dit tendrement : « Mes voix ! »
Voix saintes, voix de la conscience, qu’elle porte avec elle aux batailles, aux prisons, contre l’Anglais, contre l’Église. Là le monde est changé. À la résignation passive du chrétien (si utile aux tyrans), succède l’héroïque tendresse qui prend à cœur nos maux, qui veut mettre ici-bas la justice de Dieu, qui agit, qui combat, qui sauve et qui guérit.
Qui a fait ce miracle, contraire à l’Évangile ? un amour supérieur, l’amour dans l’action, l’amour jusqu’à la mort ; « la pitié qui estoit au royaume de France. »
Le spectacle est divin lorsque sur l’échafaud, l’enfant abandonnée et seule, contre le prêtre-roi, la meurtrière Église, maintient en pleines flammes son Église intérieure, et s’envole en disant : « Mes voix ! »