Page:Michelet - La Mer, 1875.djvu/164

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dans la botanique où il avait passé sa vie et de lui imposer d’enseigner les animaux. Ce génie ardent et fait aux miracles pour les transformations des plantes, plein de foi dans l’unité de la vie, fit sortir et les animaux, et le grand animal, le globe, de l’état pétrifié où on les tenait. Il rétablit de forme en forme la circulation de l’esprit. Demi-aveugle, à tâtons, il toucha intrépidement mille choses dont les clairvoyants n’osaient approcher encore. Du moins, il y mettait sa flamme. Geoffroy, Cuvier et Blainville les ont trouvées chaudes et vivantes. « Tout est vivant, disait-il, ou le fut. Tout est vie, présente ou passée. » Grand effort révolutionnaire contre la matière inerte, et qui irait jusqu’à supprimer l’inorganique. Rien ne serait mort tout à fait. Ce qui a vécu peut dormir et garder la vie latente, une aptitude à revivre. Qui est vraiment mort ? personne.

Ce mot a enflé d’un souffle immense les voiles du dix-neuvième siècle. Hasardé, ou non, il nous a poussés où nous n’aurions été jamais. Nous nous sommes mis en quête, demandant à chaque chose, histoire ou histoire naturelle : « Qui es-tu ? — Je suis la vie. » — La mort a été fuyant sous le regard des sciences. L’esprit va toujours vainqueur et la faisant reculer.