Page:Michelet - La Mer, 1875.djvu/336

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pulation mixte serait née, à laquelle ce continent du Nord aurait appartenu. C’était le vrai moyen de trouver aisément, de régulariser le passage qu’on désirait tant. Il y fallait trente ans ; on en a mis trois cents ; et il se trouve qu’on n’a rien fait, parce qu’en effrayant ces pauvres sauvages qui vont au Nord et meurent, on a brisé définitivement l’homme du lieu et le génie du lieu ! Qu’importe d’avoir vu ce désert, s’il devient à jamais inhabitable et impossible ?



On peut juger que si l’homme a ainsi traité l’homme, il n’a pas été plus clément ni meilleur pour les animaux. Des espèces les plus douces, il a fait d’horribles carnages, les a ensauvagées et barbarisées pour toujours.

Les anciennes relations s’accordent à dire qu’à nos premières approches, ils ne montraient que confiance et curiosité sympathique. On passait à travers les familles paisibles des lamantins et des phoques, qui laissaient approcher. Les pingouins, les manchots, suivaient le voyageur, profitaient du foyer, et, la nuit, venaient se glisser sous l’habit des matelots.

Nos pères supposaient volontiers, et non sans