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Page:Michelet - La femme.djvu/124

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« C’est elle qui, si je meurs, sur mon tombeau, à douze ans, relèvera son père de ses petites ailes, le reportera au ciel (V. la vie de Manin).

« C’est elle qui, à seize ans, d’un mot de fière exigence, met l’homme au-dessus de lui-même, lui fait dire : « Je serai grand. »

« C’est elle qui, à vingt ans, à trente et toute la vie, chaque soir ravive son mari, amorti par le métier, et dans l’aridité des intérêts, des soucis, lui fait surgir une fleur.

« Elle qui, dans les mauvais jours où l’horizon se ferme, où tout se désenchante, lui rend Dieu, le lui fait toucher et retrouver sur son sein. »

Élever une fille, c’est élever la société elle-même. La société procède de la famille dont l’harmonie est la femme. Élever une fille, c’est une œuvre sublime et désintéressée. Car tu ne la crées, ô mère, que pour qu’elle puisse te quitter et te faire saigner le cœur. Elle est destinée à un autre. Elle vivra pour les autres, non pour toi, et non pour elle. C’est ce caractère relatif qui la met plus haut que l’homme et en fait une religion. Elle est la flamme d’amour et la flamme du foyer. Elle est le berceau d’avenir, elle est l’école, autre berceau. D’un seul mot : Elle est l’autel.