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HISTOIRE DE FRANCE

amènera peu à peu à l’anéantissement de l’aristocratie, à l’égalité, à l’équité des temps modernes.

Voilà pour l’ordre civil. Mais à côté de cet ordre un autre est établi, qui doit le recueillir et le sauver pendant la tempête de l’invasion barbare. Le titre romain de defensor civitatis va partout passer aux évêques. Dans la division des diocèses ecclésiastiques subsiste celle des diocèses impériaux. L’universalité impériale est détruite, mais l’universalité catholique apparaît. La primatie de Rome commence à poindre confuse et obscure[1]. Le monde du moyen âge se maintiendra et s’ordonnera par l’Église ; sa hiérarchie naissante est un cadre sur lequel tout se place ou se modèle. À elle, l’ordre extérieur, et la vie intérieure. Celle-ci est surtout dans les moines. L’ordre de Saint-Benoît donne au monde ancien, usé par l’esclavage, le premier exemple du travail accompli par des mains libres[2]. Pour la première fois, le citoyen, humilié par la ruine de la cité, abaisse les regards sur cette terre qu’il avait méprisée. Cette grande innovation du travail libre et volontaire sera la base de l’existence moderne.

L’idée même de la personnalité libre, qui nous apparaissait confuse dans la barbarie guerrière des clans galliques, plus distincte dans le druidisme, dans sa doctrine d’immortalité, elle éclate au cinquième siècle. Le Breton[3] Pélage pose la loi de la philosophie

  1. App. 30.
  2. App. 31.
  3. Né, selon les uns dans notre Bretagne, selon d’autres dans les îles Britanniques, ce qui du reste ne change rien à la question. Il suffit qu’il ait appartenu à la race celtique.