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CARLOVINGIENS

l’opinion des Orientaux, n’osa pas cependant s’expliquer contre Charlemagne. Il montra la même prudence lorsque l’Église de France, à l’imitation de celle d’Espagne, ajouta au symbole de Nicée que le Saint-Esprit procède aussi du Fils (Filioque).

Pendant que Charlemagne disserte sur la théologie, rêve l’Empire romain, et étudie la grammaire, la domination des Francs croule tout doucement. Le jeune fils de Charlemagne, dans son royaume d’Aquitaine, ayant, par faiblesse ou justice, donné, restitué toutes les spoliations de Pepin[1], son père lui en fit un reproche ; mais il ne fit qu’accomplir volontairement ce qui déjà avait lieu de soi-même. L’ouvrage de la conquête se défaisait naturellement ; les hommes et les terres échappaient peu à peu au pouvoir royal pour se donner aux grands, aux évêques surtout, c’est-à-dire aux pouvoirs locaux qui allaient constituer la république féodale.

Au dehors, l’Empire faiblissait de même. En Italie, il avait heurté en vain contre Bénévent, contre Venise ; en Germanie, il avait reculé de l’Oder à l’Elbe, et partagé avec les Slaves. Et en effet, comment toujours combattre, toujours lutter contre de nouveaux ennemis ? Derrière les Saxons et les Bavarois Charlemagne avait trouvé les Slaves, puis les Avares ; derrière les Lombards, les Grecs ; derrière l’Aquitaine et l’Èbre, le califat de Cordoue. Cette ceinture de barbares, qu’il crut simple et qu’il rompit

  1. App. 144.