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HISTOIRE DE FRANCE

du moins, accepte cette immolation volontaire[1] ! »

Cet idéal de l’amour pur et désintéressé, Abailard, avant les mystiques, avant Fénelon, l’avait posé dans ses écrits comme la fin de l’âme religieuse[2]. La femme s’y éleva pour la première fois dans les écrits d’Héloïse, en le rapportant à l’homme, à son époux, à son dieu visible. Héloïse devait revivre sous une forme spiritualiste en sainte Catherine et sainte Thérèse.

La restauration de la femme eut lieu principalement au douzième siècle. Esclave dans l’Orient, enfermée encore dans le gynécée grec, émancipée par la jurisprudence impériale, elle fut dans la nouvelle religion l’égale de l’homme. Toutefois le christianisme, à peine affranchi de la sensualité païenne, craignait toujours la femme et s’en défiait. Il reconnaissait sa faiblesse et sa contradiction. Il repoussait la femme d’autant plus qu’il avait plus nié la nature. De là, ces expressions dures, méprisantes même, par lesquelles il s’efforce de se prémunir. La femme est communément désignée, dans les écrivains ecclésiastiques et dans les Capitulaires, par ce mot dégradant : Vas infirmius. Quand Grégoire VII voulut affranchir le clergé de son double lien, la femme et la terre, il y eut un nouveau déchaînement contre cette dangereuse Ève, dont la séduction

  1. .   .   .   .   .   O maxime conjux!
    O thalamis indigne meis ! hoc juris habebat
    In tantum fortuna caput ! Cur impia nupsi,
    Si miserum factura fui ? Nunc accipe pœnas,
    Sed quas sponte luam.

  2. Comment. in epist. ad Romanos.