Flandre rendait au roi Amiens, c’est-à-dire la barrière de la Somme, et lui promettait l’Artois, le Valois et le Vermandois. Tant que le roi n’avait point l’Oise et la Somme, on pouvait à peine dire que la monarchie fût fondée. Mais une fois maître de la Picardie, il avait peu à craindre la Flandre, et pouvait prendre la Normandie à revers. Le comte de Flandre essaya en vain de ressaisir Amiens, en se confédérant avec les oncles du roi[1]. Celui-ci employa l’intervention du vieil Henri II, qui craignait en Philippe l’ami de son fils Richard, et il obtint encore que le comte de Flandre rendrait une partie du Vermandois (Oise). Puis, quand le Flamand fut près de partir pour la croisade, Philippe, soutenant la révolte de Richard contre son père, s’empara des deux places si importantes du Mans et de Tours ; par l’une il inquiétait la Normandie et la Bretagne ; par l’autre, il dominait la Loire. Il avait dès lors dans ses domaines les trois grands archevêchés du royaume, Reims, Tours et Bourges, les métropoles de Belgique, de Bretagne et d’Aquitaine.
La mort d’Henri II fut un malheur pour Philippe ; elle plaçait sur le trône son grand ami Richard, avec qui il mangeait et couchait, et qui lui était si utile pour tourmenter le vieux roi. Richard devenait lui-même le
- ↑ Lorsque Philippe apprit les premiers mouvements de grands vassaux, il dit sans s’étonner, en présence de sa cour, au rapport d’une ancienne chronique manuscrite : « Jaçoit ce chose que il facent orendroit (dorénavant) lor forces ; et lor grang outraiges et grang vilonies, si me les convient à souffrir ; se à Dieu plest, ils affoibloieront et envieilliront, et je croistrai se Dieu plest, en force et en povoir : si en serai en tores (à mon tour) vengié à mon talent. »