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HISTOIRE DE FRANCE

tion le langage de l’amour, comme il leur a donné une tendance à s’élever de l’amour du réel à celui de l’idéal.

Un poète persan dit en s’adressant à Dieu :

« C’est votre beauté, ô Seigneur ! qui, toute cachée qu’elle est derrière un voile, a fait un nombre infini d’amants et d’amantes ;

« C’est par l’attrait de vos parfums que Leyla ravit le cœur de Medjnoun ; c’est par le désir de vous posséder que Vamek poussa tant de soupirs pour celle qu’il adorait. » (Reinaud, I, 52.)

Du mysticisme à l’absolue indifférence

Le principe de la doctrine ésotérique était : Rien n’est vrai et tout est permis. (Hammer, p. 87.) Un imam célèbre écrivit contre les Hassanites un livre intitulé : De la Folie des partisans de l’indifférence en matière de religion.


65 — page 178Pierre-l’Ermite

Guibert. Nov., l. II, c. viii : « Le petit peuple, dénué de ressources, mais fort nombreux, s’attacha à un certain Pierre-l’Ermite, et lui obéit comme à son maître, du moins tant que les choses se passèrent dans notre pays. J’ai découvert que cet homme, originaire, si je ne me trompe, de la ville d’Amiens, avait mené d’abord une vie solitaire sous l’habit de moine, dans je ne sais quelle partie de la Gaule supérieure. Il partit de là, j’ignore par quelle inspiration ; mais nous le vîmes alors parcourant les villes et les bourgs, et prêchant partout : le peuple l’entourait en foule, l’accablait de présents, et célébrait sa sainteté par de si grands éloges, que je ne me souviens pas que l’on ait jamais rendu à personne de pareils honneurs. Il se montrait fort généreux dans la distribution de toutes les choses qui lui étaient données. Il ramenait à leurs maris les femmes prostituées, non sans y ajouter lui-même des dons, et rétablissait la paix et la bonne intelligence entre ceux qui étaient désunis, avec une merveilleuse autorité. En tout ce qu’il faisait ou disait, il semblait qu’il y eût en lui quelque chose de divin ; en sorte qu’on allait jusqu’à arracher les poils de son mulet, pour les garder comme reliques : ce que je rapporte ici, non comme louable, mais pour le vulgaire qui aime toutes les choses extraordinaires. Il ne portait qu’une tunique de laine, et, par-dessus, un manteau de bure qui lui descendait jusqu’aux talons : il avait les bras et les pieds nus, ne mangeait point ou presque point de pain, et se nourrissait de vin et de poissons. »


66 — page 180Tous ensemble descendirent la vallée du Danube