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L’OR. — LE FISC. — LES TEMPLIERS

violence de ces prédications populaires par celle de la lettre royale, qui courut par toute la France : « Une chose amère, une chose déplorable, une chose horrible à penser, terrible à entendre ! chose exécrable de scélératesse, détestable d’infamie !… Un esprit doué de raison compatit et se trouble dans sa compassion, en voyant une nature qui s’exile elle-même hors des bornes de la nature, qui oublie son principe, qui méconnaît sa dignité, qui, prodigue de soi, s’assimile aux bêtes dépourvues de sens ; que dis-je ? qui dépasse la brutalité des bêtes elles-mêmes !… » On juge de la terreur et du saisissement avec lesquels une telle lettre fut reçue de toute âme chrétienne. C’était comme un coup de trompette du jugement dernier.

Suivait l’indication sommaire des accusations : reniement, trahison de la chrétienté au profit des infidèles, initiation dégoûtante, prostitution mutuelle ; enfin, le comble de l’horreur, cracher sur la croix[1] !

Tout cela avait été dénoncé par des Templiers. Deux chevaliers, un Gascon et un Italien, en prison pour leurs méfaits, avaient, disait-on, révélé tous les secrets de l’ordre.

Ce qui frappait le plus l’imagination, c’étaient les bruits étranges qui couraient sur une idole qu’auraient adorée les Templiers. Les rapports variaient. Selon les uns, c’était une tête barbue ; d’autres disaient une tête à trois faces. Elle avait, disait-on encore, des yeux étincelants. Selon quelques-uns, c’était un crâne d’homme. D’autres y substituaient un chat[2].

  1. App. 64.
  2. App. 65.