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HISTOIRE DE FRANCE

ils furent brûlés à la porte Saint-Antoine. Ces malheureux avaient varié dans les prisons, mais ils ne varièrent point dans les flammes, ils protestèrent jusqu’au bout de leur innocence. La foule était muette et comme stupide d’étonnement[1].

Qui croirait que la commission pontificale eut le cœur de s’assembler le lendemain, de continuer cette inutile procédure, d’interroger pendant qu’on brûlait ?

« Le mardi 13 mai, par-devant les commissaires, fut amené frère Aimeri de Villars-le-Duc, barbe rase, sans manteau, ni habit du Temple, âgé, comme il disait, de cinquante ans, ayant été environ huit années dans l’ordre comme frère servant, et vingt comme chevalier. Les seigneurs commissaires lui expliquèrent les articles sur lesquels il devait être interrogé. Mais ledit témoin, pâle et tout épouvanté[2], déposant sous serment et au péril de son âme, demandant, s’il mentait, à mourir subitement, et à être, d’âme et de corps, en présence même de la commission, soudain englouti en enfer, se frappant la poitrine des poings, fléchissant les mains vers l’autel, dit que toutes les erreurs imputées à l’ordre étaient de toute fausseté, quoiqu’il en eût confessé quelques-unes au milieu des tortures auxquelles l’avaient soumis Guillaume de Marcillac et Hugues de Celles, chevaliers du roi. Il ajoutait pourtant qu’ayant vu emmener sur des charrettes, pour être

  1. « Constanter et perseveranter in abnegatione communi perstiterunt… non absque multa admiratione stuporeque vehementi. » (Contin. G. de Nang.)
  2. App. 81.