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HISTOIRE DE FRANCE

alors à révérer la robe ; le bourgeois enseignait à ses enfants à ôter le chaperon devant Messires, à s’écarter devant leur mule, lorsqu’au soir, par les petites rues de la Cité, ils revenaient attardés de quelque fameux jugement[1].

Les accusations vinrent en foule, ils n’eurent point à se plaindre : empoisonnements, adultères, faux, sorcellerie surtout. Cette dernière était mêlée à toutes, elle en faisait l’attrait et l’horreur. Le juge frissonnait sur son siège lorsqu’on apportait au tribunal les pièces de conviction, philtres, amulettes, crapauds, chats noirs, images percées d’aiguilles… Il y avait en ces causes une violente curiosité, un acre plaisir de vengeance et de peur. On ne s’en rassasiait pas. Plus on brûlait, plus il en venait.

On croirait volontiers que ce temps est le règne du Diable, n’étaient les belles ordonnances qui y apparaissent par intervalles, et y font comme la part de Dieu… L’homme est violemment disputé par les deux puissances. On croit assister au drame de Bartole : l’homme par-devant Jésus, le Diable demandeur, la Vierge défendeur. Le Diable réclame l’homme comme sa chose, alléguant la longue possession. La Vierge prouve qu’il n’y a pas prescription, et montre que l’autre abuse des textes[2].

La Vierge a forte partie à cette époque. Le Diable est

  1. Voy. la mort du président Minart.
  2. Rien de plus fréquent dans les hagiographes que cette lutte pour l’âme convertie, ou plutôt ce procès simulé où le Diable vient malgré lui rendre témoignage à la puissance du repentir. App. 103.