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SUITE DU RÈGNE DE PHILIPPE-LE-BEL

Toulouse, on réunit des troupes, on fondit sur les pastoureaux, on les pendit par vingt et par trente ; le reste se dissipa[1].

Ces étranges émigrations du peuple indiquaient moins de fanatisme que de souffrance et de misère. Les seigneurs, ruinés par les mauvaises monnaies, pressurés par l’usure, retombaient sur le paysan. Celui-ci n’en était pas encore au temps de la Jacquerie ; il n’était pas assez osé pour se tourner contre son seigneur. Il fuyait plutôt et massacrait les juifs. Ils étaient si détestés que beaucoup de gens se scandalisèrent de voir les gens du roi prendre leur défense. Les villes commerçantes du Midi les jalousaient cruellement. C’était précisément l’époque où, comme financiers, collecteurs, percepteurs, ils commençaient à régner sur l’Espagne. Aimés des rois pour leur adresse et leur servilité, ils s’enhardissaient chaque jour, jusqu’à prendre le titre de Don. Dès le temps de Louis-le-Débonnaire, l’évêque Agobart avait écrit un traité De insolentia Judæorum. Sous Philippe-Auguste, on avait vu avec étonnement un juif bailli du roi. En 1267, le pape avait été obligé de lancer une bulle contre les chrétiens qui judaïsaient[2].

Philippe-le-Bel les avait chassés ; mais ils étaient rentrés à petit bruit. Louis-Hutin leur avait assuré un séjour de douze ans. Aux termes de son ordonnance, on doit leur rendre leurs privilèges, si on les retrouve ; on leur restituera leurs livres, leurs synagogues, leurs

  1. App. 136.
  2. App. 137.