Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 3.djvu/206

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
196
HISTOIRE DE FRANCE

ne nous donne l’idéal de la royauté selon les gens de robe, le modèle qu’ils présentaient au roi féodal pour en faire un vrai roi comme ils le concevaient.


Ces essais estimables d’ordre et de gouvernement ne changeaient rien aux souffrances du peuple. Sous Louis-Hutin, une horrible mortalité avait enlevé, dit-on, le tiers de la population du Nord[1]. La guerre de Flandre avait épuisé les dernières ressources du pays. En 1320, il fallut bien finir cette guerre. La France avait assez à faire chez elle. L’excès de la misère exaltant les esprits, un grand mouvement avait lieu dans le peuple. Comme au temps de saint Louis, une foule de pauvres gens, de paysans, de bergers ou pastoureaux, comme on les appelait, s’attroupent et disent qu’ils veulent aller outre-mer, que c’est par eux qu’on doit recouvrer la terre sainte. Leurs chefs étaient un prêtre dégradé et un moine apostat. Ils entraînèrent beaucoup de gens simples, jusqu’à des enfants qui fuyaient la maison paternelle. Ils demandaient d’abord ; puis ils prirent. On en arrêta ; mais ils forçaient les prisons, et délivraient les leurs. Au Châtelet, ils jetèrent du haut des degrés le prévôt qui voulait leur défendre les portes ; puis, ils s’allèrent mettre en bataille au Pré-aux-Clercs, et sortirent tranquillement de Paris ; on se garda bien de les en empêcher. Ils s’en allèrent vers le Midi, égorgeant partout les juifs, que les gens du roi tâchaient en vain de défendre. Enfin à

  1. Cont. G. de Nang.