que nouveauté. Mais toi, Messine, cité puissante et noble, songes-tu donc à te défendre, à repousser l’étranger du détroit ? Malheur à toi, Catane ! Jamais, à force de calamités, tu n’as pu satisfaire et fléchir la fortune. Guerre, peste, torrents enflammés de l’Etna, tremblement de terre et ruines ; il ne te manque plus que la servitude. Allons, Syracuse, secoue la paix, si tu peux ; cette éloquence dont tu te pares, emploie-la à relever le courage des tiens. Que te sert de t’être affranchie des Denys ?… Ah ! qui nous rendra nos tyrans !… J’en viens maintenant à toi, ô Palerme, tête de la Sicile ! Comment te passer sous silence, et comment te louer dignement !… » Mais dès que Falcando a nommé la belle Palerme, il ne pense plus à autre chose, il oublie les barbares et toutes ses craintes. Le voilà qui décrit insatiablement la voluptueuse cité, ses palais fantastiques, son port, ses merveilleux jardins, soyeux mûriers, orangers, citronniers, cannes à sucre. Le voilà perdu dans les fruits et les fleurs. La nature l’absorbe, il rêve, il a tout oublié. Je crois entendre dans sa prose l’écho de la poésie paresseuse, sensuelle et mélancolique de l’idylle grecque : « Je chanterai sous l’antre, en te tenant dans mes bras, et regardant les troupeaux qui s’en vont paissant vers les bords de la mer de Sicile[1]. »
C’était le lundi, 30 mars 1282, le lundi de Pâques. En Sicile, c’est déjà l’été, comme on dirait chez nous la Saint-Jean, quand la chaleur est déjà lourde, la terre
- ↑ Théocrite.