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L’ANGLETERRE. — PHILIPPE-DE-VALOIS

les jours, bravent la colère de l’Océan, n’ont pas peur de celle d’un homme. Il se trouva sur-le-champ, dans cette petite ville dépeuplée par la famine, six hommes de bonne volonté pour sauver les autres. Il s’en présente tous les jours autant et davantage dans les mauvais temps, pour sauver un vaisseau en danger. Cette grande action, j’en suis sûr, se fit tout simplement, et non piteusement, avec larmes et longs discours, comme l’imagine le chapelain Froissart[1].

Il fallut pourtant les prières de la reine et des chevaliers pour empêcher Édouard de faire pendre ces braves gens. On lui fit comprendre sans doute que ces gens-là s’étaient battus pour leur ville et leur commerce, plutôt que pour le roi ou le royaume. Il repeupla la ville d’Anglais, mais il admit parmi eux plusieurs Calaisiens, qui se tournèrent Anglais, entre autres Eustache de Saint-Pierre, le premier de ceux qui lui avaient apporté les clefs[2].

Ces clefs étaient celles de la France. Calais, devenue anglaise, fut pendant deux siècles une porte ouverte à

  1. App. 176.
  2. Froissart dit : « Et puis firent (les Anglais) toutes manières de gens petits et grands, partir (de Calais). » — « Tout Français ne fut pas exclu, dit M. de Bréquigny ; j’ai vu au contraire quantité de noms français parmi les noms des personnes à qui Édouard accorda des maisons dans sa nouvelle conquête. Eustache de Saint-Pierre fut de ce nombre. » — Philippe fit ce qui était en son pouvoir pour récompenser les habitants de Calais. Il accorda tous les offices vacants (8 septembre, un mois après la reddition) à ceux d’entre eux qui voudraient s’en faire pourvoir. Dans cette ordonnance il est fait mention d’une autre par laquelle il avait concédé aux Calaisiens chassés de leur ville tous les biens et héritages qui lui échoiroient pour quelque cause que ce fût. Le 10 septembre il leur accorda de nouveau un grand nombre de privilèges et franchises, etc., confirmés sous les règnes suivants. App. 177.