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HISTOIRE DE FRANCE

personne ne payait. Le dauphin restait désarmé, les États aussi. Il n’y avait plus de pouvoir public, ni roi, ni dauphin, ni États.

Le royaume, sans force, se mourant, pour ainsi dire, et perdant conscience de soi, gisait comme un cadavre. La gangrène y était, les vers fourmillaient ; les vers, je veux dire les brigands, anglais, navarrais. Toute cette pourriture isolait, détachait l’un de l’autre les membres du pauvre corps. On parlait du royaume ; mais il n’y avait plus d’États vraiment généraux, rien de général, plus de communication, de route pour s’y rendre. Les routes étaient des coupe-gorge. La campagne un champ de bataille ; la guerre partout à la fois, sans qu’on pût distinguer ami ou ennemi.

Dans cette dissolution du royaume, la commune restait vivante[1]. Mais comment la commune vivrait-elle seule, et sans secours du pays qui l’environne ? Paris, ne sachant à qui se prendre de sa détresse, accusait les États. Le dauphin enhardi déclara qu’il voulait gouverner, qu’il se passerait désormais de tuteur. Les commissaires des États se séparèrent. Mais il n’en fut que plus embarrassé. Il essaya de faire un peu d’argent en vendant des offices, mais l’argent ne vint pas. Il sortit de Paris ; toute la campagne était en feu. Il n’y avait pas de petite ville où il ne pût être enlevé par les brigands. Il revint se blottir à Paris, et se remettre aux mains des États. Il les convoqua pour le 7 novembre.

  1. App. 201.