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ÉTATS GÉNÉRAUX

Ruiné par son seigneur, le paysan n’était pas quitte. Ce fut le caractère atroce de ces guerres des Anglais ; pendant qu’ils rançonnaient le royaume en gros, ils le pillaient en détail. Il se forma par tout le royaume des compagnies, dites d’Anglais ou de Navarrais. Le Gallois Griffith désolait tout le pays entre Seine et Loire, l’Anglais Knolles la Normandie. Le premier à lui seul saccagea Montargis, Étampes, Arpajon, Montlhéry, plus de quinze villes ou gros bourgs[1]. Ailleurs, c’étaient l’Anglais Audley, les Allemands Albrecht et Frank Hennekin. Un de ces chefs, Arnaud de Cervoles, qu’on appelait l’archiprêtre, parce qu’en effet, quoique séculier, il possédait un archiprêtré, laissa les provinces déjà pillées, traversa toute la France jusqu’en Provence, mit à sac Salon et Saint-Maximin pour épouvanter Avignon. Le pape tremblant invita le brigand, le reçut comme un fils de France[2], le fit dîner avec lui, et lui donna quarante mille écus, de plus l’absolution. Cervoles, en sortant d’Avignon, n’en pilla pas moins la ville d’Aix, d’où il alla en Bourgogne pour en faire autant.

Ces chefs de bande n’étaient pas, comme on pourrait croire, des gens de rien, de petits compagnons, mais des nobles, souvent des seigneurs. Le frère du roi de Navarre pillait comme les autres[3]. Dans les saufs-conduits qu’ils vendaient aux marchands qui approvisionnaient les villes, ils exceptaient nommément les choses

  1. Froissart.
  2. Idem.
  3. Philippe-le-Hardi, duc de Bourgogne, l’appelait son compère. Froissart l’appelle Monseigneur.