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EXPULSION DES ANGLAIS

paroles au pape d’Avignon : « Meurtrier des âmes, pire que Pilate et Judas ! Judas n’a vendu que moi. Toi, tu vends encore les âmes de mes élus[1]. »

Les papes qui suivirent Clément VI furent moins souillés, mais plus ambitieux. Ils rendirent l’Église conquérante, désolèrent l’Italie. Clément avait acheté Avignon à la reine Jeanne en l’absolvant du meurtre de son mari. Ses successeurs, avec l’aide des compagnies, reprirent tout le patrimoine de saint Pierre. Cette association du pape avec les brigands anglais et bretons porta au comble l’exaspération des Italiens. La guerre devint atroce, pleine d’outrages et de barbarie. Les Visconti donnèrent le choix aux légats qui leur apportaient l’excommunication, de se laisser noyer ou de manger la bulle. À Milan, on jetait les prêtres dans des fours allumés ; à Florence, on voulait les enterrer vifs. Les papes sentirent que l’Italie leur échapperait s’ils ne quittaient Avignon.

Ils tenaient moins sans doute à cette ville, depuis qu’ils y avaient été rançonnés par les compagnies. L’abaissement de la France les laissait libres de choisir leur séjour. Urbain V, le meilleur de ces papes, essaya de se fixer à Rome. Il y alla et n’y put rester. Grégoire s’y établit et y mourut.

À sa mort, les Français avaient dans le conclave une majorité rassurante. Cependant ce conclave se tenait à Rome ; les cardinaux entendaient un peuple furieux crier autour d’eux : « Romano lo volemo o

  1. App. 269.