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HISTOIRE DE FRANCE

prêtres. Ce livre est très proche parent de l’Avocat Patelin et de la Satyre Ménippée.

Revenons. Il y avait dans l’ordre apparent qu’on admirait sous Charles V, et dans le système général du quatorzième siècle, quelque chose de faible et de faux. La nouvelle religion, sur laquelle tout reposait, la royauté, se fondait elle-même sur une équivoque. De suzeraineté féodale elle s’était faite, sous l’influence des légistes, monarchie romaine, impériale. Les établissements de France et d’Orléans étaient devenus les établissements de la France. Le roi avait énervé la féodalité, lui avait ôté les armes des mains ; puis, la guerre venant, il avait voulu les lui rendre. Elle subsistait encore cette féodalité, pleine d’orgueil et de faiblesse. C’était comme une armure gigantesque qui, toute vide qu’elle est, menace et brandit la lance. Elle tomba dès qu’on la toucha, à Créci et à Poitiers.

Il fallut bien alors employer les mercenaires, les soldats de louage, c’est-à-dire faire la guerre avec de l’argent. Mais cet argent, où le prendre ? On n’osait encore dépouiller l’Église, et l’industrie n’était pas née. Charles V, avec toute sa sagesse politique, ne pouvait rien faire à cela. Au dernier moment, tout lui manqua à la fois. Les Anglais, qui traversèrent la France en 1380, ne rencontrèrent pas plus de résistance qu’en 1370 ; le roi, qui n’avait plus les Bretons, se trouvait plus faible encore.

La sagesse ayant échoué, on essaya de la folie. La France se lança sous le jeune Charles VI dans une extravagante imitation de la chevalerie ancienne,