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PHILIPPE-LE-BEL. — BONIFACE VIII

Boniface avait décidé entre Philippe et Édouard, non comme ami et personne privée, mais comme pape. Le comte d’Artois, indigné de la partialité du pontife pour les Flamands, arracha la bulle au légat et la jeta au feu. En représailles, Boniface favorisa Albert d’Autriche contre Charles-de-Valois, qui prétendait à la couronne impériale. De son côté, Philippe mit la main sur les régales de Laon, de Poitiers et de Reims. Il accueillait les mortels ennemis de Boniface, les Colonna, ces rudes gibelins, ces chefs des brigands romains contre les papes.

L’explosion eut lieu au sujet d’un bien mal acquis, que depuis un siècle se disputaient le pape et le roi. Je parle de cette sanglante dépouille du Languedoc. Boniface VIII paya pour Innocent III. L’hommage de Narbonne, rendu directement au roi par le vicomte, était vivement réclamé par l’archevêque (1300). L’archevêque eût voulu s’arranger. Le pape le menaça d’excommunication, s’il traitait sans la permission du Saint-Siège. Il cita à Rome l’homme du roi, et, de plus, menaça Philippe, s’il ne se désistait du comté de Melgueil, dont ses officiers dépouillaient l’église de Maguelone.

Ce n’est pas tout : le pape avait, malgré Philippe, créé, dans ce dangereux Languedoc, à la porte du comte de Foix et du roi d’Aragon, un nouvel évêché pris sur le diocèse de Toulouse, l’évêché de Pamiers. Il avait fait évêque un homme à lui, Bernard de Saisset. Ce fut justement ce Saisset qu’il envoya au roi pour lui rappeler sa promesse d’aller à la croisade, et