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PHILIPPE-LE-BEL. — BONIFACE VIII

pas de plus ; on compromit directement la noblesse avec le pape. Le 11 février 1302, en présence du roi et d’une foule de seigneurs et de chevaliers, au milieu du peuple de Paris, la petite bulle fut brûlée, et cette exécution fut ensuite criée à son de trompe par toute la ville[1]. Encore deux cents ans, un moine allemand fera de son autorité privée ce que Pierre Flotte et Nogaret font maintenant au nom du roi de France.

Mais il fallait engager tout le royaume dans la querelle. Le pape avait convoqué les prélats à Rome pour le 1er novembre ; le roi convoqua les États pour le 10 avril ; non plus les États du clergé et de la noblesse, non plus les États du Midi, comme saint Louis les avait rassemblés, mais les États du Midi et du Nord, les États des trois ordres : clergé, noblesse et bourgeoisie des villes. Ces États généraux de Philippe-le-Bel sont l’ère nationale de la France, son acte de naissance. Elle a été ainsi baptisée dans la basilique de Notre-Dame, où s’assemblèrent ces premiers États[2]. De même que le Saint-Siège, au temps de Grégoire VII et d’Alexandre III, s’était appuyé sur le peuple, l’ennemi du Saint-Siège appelle maintenant le peuple à lui. Ces bourgeois, maires, échevins, consuls des villes, sous quelque forme humble et servile qu’ils viennent d’abord répéter les paroles du roi et des nobles, ils

  1. App. 17.
  2. Ont-ils été les premiers ? M. de Stadler signale des assemblées partielles en 1294, et une assemblée générale à Paris en 1295. Philippe-le-Bel avait déjà plus d’une fois demandé des subsides à des assemblées de députés des trois ordres, soit sous la forme d’États provinciaux, soit sous la forme d’États généraux.